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Cabinet d'avocats

Le recours au droit dans la lutte contre les discriminations

la question de la preuve (travaux du GED - Groupe d'Etude contre les Discriminations)

  

 

 

 

 

  

 

 

 Le recours au droit

 dans la lutte contre les discriminations :

la question de la preuve

 

 

 

 

Note n°2 du conseil d’orientation du GELD

Octobre 2000


Cette note a été réalisée dans le cadre d’un groupe de travail mis en place au sein du GED et animé par Marie-Thérèse Lanquetin, membre du Conseil d’orientation du GED, assistée de Sophie Latraverse et Nicolas Pataridzé, chargés d’étude au GED.

 

Tous les membres du conseil d’administration et du conseil d’orientation du GED ont été invités à participer à ces travaux ainsi que des personnalités qualifiées sur le thème traité.

 

Ont assisté aux travaux du groupe de travail de façon régulière ou lors du traitement de certains thèmes:

 

Anissa Allouache, Université de Paris X-Nanterre

Clémentine Autain, chargée de mission au GED

Dominique Barelli, ministère de l’emploi et de la solidarité (DPM)

Omar Benfaid, CFDT

Gwenaële Calvès, Université de Cergy-Pontoise

François Capin-Dulhoste, ministère de la justice (Direction des affaires criminelles et des grâces)

Didier Cauchois, CFDT

Marie-Thérèse Chicha, Université de Montréal

Patrick Chorowicz, ministère de la jeunesse et de sports

Olivera Djukic, CFDT

Geneviève Coudrais, avocate

Nathalie Ferré, Université de Paris XIII-Villetaneuse

Elisabeth Fortis, Université de Paris X-Nanterre

Chantal Foulon, MEDEF

Annie Fusalba, ministère de la justice (SAEI)

Manuela Grévy, CFDT

Jérôme Guedj, directeur du GED

Mohand Hamoumou, sociologue, membre du conseil d’orientation du GED

Nicole Hoarau, SOS Racisme

Charles Korman, LICRA.

Fériel Kachoukh, ministère de l’emploi et de la solidarité (service droit des femmes)

Catherine Laret-Bedel, ministère de l’emploi et de la solidarité (service droit des femmes)

Pierre Lenoël, Mission de recherche droit et justice

Jean-Paul Le Divenah, FAS

Christian Marot, ministère de l’emploi et de la solidarité (DPM)

Corinne Marrès, Force Ouvrière

Odile Menneteau, MEDEF

Michel Miné, Université de Cergy-Pontoise

Pascal Noblet, ministère de l’emploi et de la solidarité (direction générale de l’action sociale)

Sophie Pisk, MRAP

Lionel Rinuy, ministère de la justice (SAEI)

Valérie Rogé, FAS

Samuel Thomas, SOS Racisme

Nina Ventura, MRAP

Caroline Yadan-Pesah, LICRA.


Ont été auditionné par le groupe de travail :

 

François Capin-Dulhoste, ministère de la justice (Direction des affaires criminelles et des grâces)

François Cordier, Premier Substitut de la 17e section, Parquet de Paris

Bernard Grassi, Association Villermé

Tiennot Grumbach, avocat

 

 

Réserves :

 

-         Associé aux travaux du groupe de travail réuni par le GED sur le rapport au droit et les discriminations, le MEDEF fait toutes ses réserves sur les orientations présentées dans le document joint.

 

 

 


Sommaire

Introduction   5

I – LES PRINCIPES DIRECTEURS POUR UN RECOURS PLUS EFFICACE AU DROIT DANS LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS   8

1°) DES DIFFERENTES CONCEPTIONS DE L’EGALITE ET DE LA DISCRIMINATION EN DROIT FRANÇAIS ET EN DROIT COMMUNAUTAIRE   8

2°) L’UNIFICATION PROGRESSIVE DES NOTIONS ET DES REGLES DE PREUVE SOUS L’IMPULSION DU DROIT COMMUNAUTAIRE   11

1 – LES DEFINITIONS  12

2- LA PREUVE DE LA DISCRIMINATION   16

3°) TRAITEMENT CIVIL ET TRAITEMENT PENAL DES DISCRIMINATIONS  17

A- DES PERSPECTIVES FAVORABLES AU DEVELOPPEMENT CIVIL DE LA DISCRIMINATION   18

B- DIFFICULTE ET NECESSITE DU TRAITEMENT PENAL DES DISCRIMINATIONS  19

4°) QUELS ACTEURS POUR LUTTER JURIDIQUEMENT CONTRE LES DISCRIMINATIONS ?  24

II - LES DIFFICULTES DE LAPREUVE .  QUELQUES RECOMMANDATIONS   29

1°) LA PREUVE CIVILE   29

A- L’AFFIRMATION DU DROIT D’ACCES A LA PREUVE  30

B-  LES VOIES D’AMELIORATION EN MATIERE CIVILE  31

2°) LA REPRESSION PENALE DE LA DISCRIMINATION   41

A- LA DEFINITION ACTUELLE DU DELIT DE DISCRIMINATION   41

B- CONSTRUIRE UNE POLITIQUE PENALE DE LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS  52

Conclusion   58

Liste des recommandations   59

Annexes   62

Annexe 1 Note de l’Association Villermé relative au rôle des Inspecteurs du travail dans les luttes contre les discriminations  62

Annexe 2 Quelques arrêts et jugements en matière de discrimination raciale  68

BIBLIOGRAPHIE   73


Introduction

 

 

Le droit peut-il permettre de lutter contre les discriminations ? Peut-il être “une menace crédible”[1] ? La preuve de la discrimination constitue-t-elle un enjeu ? C’est à ces questions que le groupe de travail créé au sein du Groupe d’Etude sur les Discriminations (GED) a tenté de répondre entre mars et octobre 2000, ce qui donne lieu à cet essai de synthèse.

 

Le contexte dans lequel se sont déroulés ces travaux était particulier dans la mesure où le gouvernement préparait la transposition de la directive 97/80 du 15 décembre 1997 relative à la charge de la preuve dans les cas de discriminations à raison du sexe… Ce fut l’objet des articles 46 à 49 du projet de loi de modernisation sociale présenté au mois de mai 2000[2], qui devait être discuté au mois de juin mais dont la discussion a été reportée à l’année 2001. Finalement, les articles relatifs à la preuve de la discrimination doivent être débattus à partir du 12 octobre 2000 sous forme de proposition de loi du groupe socialiste[3]. Le régime juridique de la preuve des discriminations prohibées par le Code du travail sera le même quelque soit le motif[4]. Autrement dit, la preuve de la discrimination à raison du sexe entraîne une évolution générale de la preuve de toutes les discriminations.

 

Cette évolution a été anticipée par la Chambre sociale de la Cour de cassation qui, dans deux  décisions du mois de novembre 1999 et de mars 2000, a appliqué le régime juridique de la preuve prévu par la directive 97/80, non seulement en matière de discrimination à raison du sexe mais également en matière de discrimination syndicale[5].

 

Enfin, la Commission européenne a proposé au mois de novembre 1999 aux Etats membres, des projets de directives ainsi qu’un programme d’action et une proposition de décision, sur le fondement de l’article 13 du Traité d’Amsterdam[6]. La proposition de directive dite transversale concernait la discrimination en raison de la “ race ” ou de l’origine ethnique dans un champ plus large que le seul domaine de l’emploi[7]. L’autre proposition de directive dite verticale avait pour champ d’application l’emploi et concernait les autres motifs de discrimination prévus à l’article 13, à l’exception du sexe qui avait déjà fait l’objet de directives. Ces propositions de directives reprenaient pour partie les concepts forgés par la CJCE en matière de discrimination à raison du sexe[8]. L’acquis conceptuel est ici important même s’il a mis fort longtemps à être accepté par notre système juridique national. Enfin, il est prévu une coordination entre les différents textes communautaires lorsque tous ces textes seront adoptés.

 

La première directive relative à la mise en œuvre de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race et d’origine ethnique a été adoptée au mois de juin 2000 (directive du Conseil de l’UE 2000 /43 du 29 juin 2000). La “ directive emploi ” devrait être adoptée sous la présidence française de l’Union européenne. Enfin, un projet de modification de la directive 76/207 est en préparation[9].

 

Il est vrai que le GED a été créé pour étudier les discriminations “ à raison de l’origine étrangère, réelle ou supposée”, mais les outils conceptuels ne sont pas particuliers à ce type de discrimination, même s’il peut exister des spécificités. D’où l’approche transversale de ce rapport. Par ailleurs, si le domaine de l’emploi est fréquemment cité dans ce rapport, la directive 2000/43 qui doit être transposée avant le 19 juillet 2003[10] a un champ d’application plus large qu’il convient de ne pas oublier[11].

 

 

 

La première partie de ce rapport présente les principes directeurs pour un recours plus efficace au droit dans la lutte contre les discriminations. La deuxième partie du rapport constitue une récapitulation des difficultés de la preuve et des recommandations du groupe de travail, dans la perspective d’une plus grande effectivité des recours civils et pénaux en matière de discrimination.

 


I – LES PRINCIPES DIRECTEURS POUR UN RECOURS PLUS EFFICACE AU DROIT DANS LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS

 

 

Il a paru nécessaire au groupe de travail, pour tenter de répondre aux questions posées par le traitement juridique des discriminations, de dégager certains principes directeurs. Pour cela, il convient d’abord d’identifier les différentes conceptions de l’égalité et de la discrimination en droit français et en droit communautaire (1°)) pour prendre ensuite la mesure de l’unification progressive des notions et des règles de preuve sous l’impulsion communautaire (2°)).

 

La montée en puissance du traitement civil de la discrimination impulsée par les nouveaux textes conduit à s’interroger sur la place qu’il convient de faire à l’action pénale, longtemps perçue comme la seule voie dans le traitement des discriminations (3°)). Enfin, les textes ne sont rien sans des acteurs qui les font vivre, qui s’en saisissent comme autant d’outils au service de l’action. Mais ici, toutes les discriminations ne sont pas également combattues, faute pour certaines d’entre elles de trouver les acteurs aptes à les combattre (4°)) .

 

 

1°) DES DIFFERENTES CONCEPTIONS DE L’EGALITE ET DE LA DISCRIMINATION EN DROIT FRANÇAIS ET EN DROIT COMMUNAUTAIRE

 

1 – Le principe d’égalité est au fondement du système juridique français mais non le principe de non discrimination. Or, égalité et discrimination ne sont pas les deux versants d’une même médaille. En effet, toute différence de traitement, toute inégalité, ne constituent pas une discrimination. Elles ne le deviennent que si elles sont illégitimes. La discrimination est une différence arbitraire, illégitime, contraire au droit[12].

 

La notion de discrimination vient du droit international des droits de l’Homme. Elle apparaît notamment dans la Convention 111 de l’OIT de 1958, relative à l’égalité de traitement dans l’emploi et la profession[13], dans les conventions de l’ONU sur l’élimination de toute discrimination à raison de la race ou du sexe[14]. La France a ratifié ces différentes conventions internationales dont les concepts font partie de notre système juridique, ce qui ne signifie pas toutefois que ne puissent subsister des différences de conception de l’égalité et de la discrimination.


 

2 – La conception française de l’égalité

 

L’égalité, comme le souligne le rapport du Conseil d’Etat, est un principe fondateur de la démocratie[15]. Ce rapport évoque la puissance presque magique des dix mots de l’article 1er de la Déclaration des Droits de 1789 : “ les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ”[16]. Mais, comment appliquer le même principe à l’homme en sa qualité d’être universel, mais aussi en sa qualité de citoyen, sujet de droits politiques, et enfin en sa qualité d’homo economicus, sujet de droits économiques et sociaux ? D’un côté se trouve l’homme abstrait, de l’autre, l’homme concret dont la situation économique peut justifier un traitement différencié.

 

La construction du principe d’égalité a consisté à définir les différences de traitement qui doivent être interdites en toutes circonstances, celles qui sont acceptables au regard des différences de situation et celles qui sont justifiées par des motifs d’intérêt général.

 

S’agissant des différences acceptables au regard des différences de situations, le droit français de l’égalité manifeste ici sa spécificité. La possibilité offerte au pouvoir législatif ou exécutif de diversifier la règle en fonction des différences de situation témoigne, selon le rapport précité, de la capacité du principe d’égalité à s’adapter aux réalités. Cependant, ajoute-t-il, l’acceptation réaliste du principe ne va pas en général jusqu’à exiger de l’auteur de la règle que les situations différentes soient traitées différemment. La règle est réputée, a priori, satisfaire  les contraintes du principe d’égalité dès lors qu’elle est la même pour tous. Autrement dit, “ l’héritage culturel centralisateur conduit en principe les juges du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel à ne pas admettre que l’égalité puisse être rompue par un traitement uniforme de situations différentes parce que l’égalité siège dans la généralité de la règle ”[17].

 

On touche ici aux limites de la conception française de l’égalité qui privilégie l’application d’une règle identique, même en présence de situations différentes, ce qui peut avoir des effets très diversifiés selon les catégories de personnes visées. Au regard d’autres règles, comme celles du droit communautaire, un tel traitement peut, le cas échéant, être reconnu comme discriminatoire.

 

Dès le départ, la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a construit une interprétation plus concrète de l’égalité et de la discrimination que la conception française. Le droit communautaire considère en effet que la discrimination consiste soit dans le traitement de manière différente de situations similaires, soit dans le traitement identique de situations différentes. La CJCE a appliqué ce principe dans le domaine économique pour lutter contre les distorsions de concurrence par sa jurisprudence sur “ les mesures d’effet équivalent ”. Dans le domaine social, elle a élaboré la notion de discrimination indirecte, “ mesure apparemment neutre qui aboutit au même résultat qu’une discrimination directe ”.

 

Pour la CJCE, l’égalité de traitement fait partie des principes généraux du droit communautaire dont elle a pour mission d’assurer le respect. Elle tend ainsi à réaliser l’égalité en droit et en fait. Ainsi, lorsque des travailleurs à temps partiel ne bénéficient pas des mêmes droits que les travailleurs à temps plein dans une entreprise et que le groupe des travailleurs à temps partiel est composé majoritairement de femmes, la mesure est suspecte et une salariée est en droit de penser que la mesure est discriminatoire[18].

 

Pour le Conseil d’Etat, seul compte le fait que “ les dispositions d’un texte s’appliquent sans distinction aux hommes et aux femmes ”[19]. Ainsi, toute discussion sur la légalité d’un texte réglementaire moins favorable aux stagiaires à temps partiel de la fonction publique d’Etat qu’aux agents titulaires ou aux stagiaires de la fonction publique territoriale, sera écartée sans qu’il y ait lieu de rechercher si cette catégorie est composée majoritairement de femmes.

 

  


2°) L’UNIFICATION PROGRESSIVE DES NOTIONS ET DES REGLES DE PREUVE SOUS L’IMPULSION DU DROIT COMMUNAUTAIRE

 

1 - La notion de discrimination a d’abord été définie dans les conventions internationales des droits de l’Homme. Mais ces définitions ne sont pas mises en œuvre dans notre droit.

 

Dans la Convention 111 de l’OIT par exemple, “ le terme de discrimination comprend toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale qui a pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de profession ”. Dans la Convention de l’ONU sur l’élimination de toute discrimination à l’égard des femmes, l’article 1er dispose : “ l’expression de discrimination à l’égard des femmes vise ‘toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice par les femmes quelque soit leur état matrimonial, sur la base de l’égalité de l’homme et de la femme, des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine’ ”. Enfin, la discrimination est définie de la même façon dans la Convention de l’ONU sur la discrimination raciale.

 

Ces textes visent d’abord l’effet de la distinction opérée, c’est-à-dire son résultat objectif.

 

Les mobiles et les intentions de l’auteur de la distinction peuvent ne pas être pris en considération et la discrimination peut exister indépendamment de toute recherche sur le but et les intentions de l’auteur de la distinction. Ces textes consacrent une conception objective de la discrimination, même si la preuve de l’intention ou du but discriminatoire peut également concourir à cette qualification. La conception objective est conforme à la conception civile de la discrimination tandis que la recherche de l’intention renvoie aux débats sur les éléments constitutifs de l’infraction pénale de discrimination.

 

2 - Les directives communautaires réservent d’ailleurs l’application du droit communautaire des discriminations, et spécialement les règles de preuve, à leur dimension civile. Et l’interprétation communautaire de la notion de discrimination se fonde sur les effets des mesures prises par l’auteur des distinctions.

 

Toute la construction de la CJCE se fonde sur une approche objective des discriminations, sur l’effet des mesures, distinctions, critères ou pratiques opérés. Surtout, la force de la jurisprudence tient en cette matière, à la construction de la notion de discrimination indirecte : mesure apparemment neutre qui a le même effet qu’une discrimination directe. Cependant, la discrimination indirecte se différencie de la discrimination directe par les justifications qui peuvent être apportées aux mesures, pratiques ou critères utilisés. En effet, toute mesure susceptible de produire un effet défavorable n’est pas nécessairement constitutive d’une discrimination. Elle est suspecte et c’est la nature des justifications qui permettra de faire le partage entre une distinction légitime et illégitime.

 

 

 

 

 

1 – LES DEFINITIONS

 

LA DISCRIMINATION DIRECTE s’entend du traitement défavorable d’une personne en raison de sa nationalité ou de son sexe et, sur le fondement de l’article 13 du traité d’Amsterdam, “ de sa race ou de son origine ethnique ”, de sa religion ou de ses convictions, de son handicap, de son âge ou de son orientation sexuelle.

 

L’article 2 (par.1a) de la directive 2000/43 du 29 juin 2000 donne une définition de la discrimination directe : “ Une discrimination directe se produit lorsque, pour des raisons de race ou d’origine ethnique, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable ”. Cette définition est reprise à l’identique dans la proposition de “ directive emploi ”.

     

Dès lors qu’une distinction est faite alors qu’elle est fondée directement sur la race, il y a discrimination sans justification possible. S’applique alors l’égalité formelle, c’est-à-dire les différences de traitement qui doivent être interdites en toutes circonstances.

 

Comment interpréter les différents temps employés ? Le présent – “ lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est ” - renvoie à une comparaison actuelle. Le passé – “ ne l’a été ” - peut jouer différents rôles puisqu’il s’applique à des situations comparables et non à une même situation. L’expression peut viser une succession d’emplois et des situations passées (une femme moins rémunérée qu’un homme par exemple, situation qui a donné lieu à de la jurisprudence communautaire mais aussi nationale)[20].

 

Quant au conditionnel - “ ne le serait ” -, il permet de comparer le traitement de personnes d’un groupe avec celui qui serait accordé si tel autre groupe était présent dans l’entreprise. Cela permet de se poser la question de savoir comment seraient rémunérés des hommes s’ils effectuaient le travail des femmes, sachant que les critères de classifications professionnelles devraient être communs[21], et ce indépendamment du point de savoir si ce sont les hommes ou les femmes qui effectuent le travail. La Chambre sociale de la Cour de cassation a même décidé que le principe d’égalité de rémunérations entre hommes et femmes était l’application du principe général “ à travail égal, salaire égal ” pour autant que les salariés soient placés dans une situation identique[22].

 

 

LA DISCRIMINATION INDIRECTE est une mesure apparemment neutre qui aboutit pourtant au même résultat que s’il y avait discrimination directe. La volonté de la CJCE est de permettre la réalisation de l’égalité en fait et en droit. La mesure peut cependant être justifiée objectivement à condition que l’objectif soit légitime et qu’elle soit proportionnée à l’objectif poursuivi, c’est-à-dire que les moyens pour l’atteindre soient appropriés et nécessaires. Autrement dit, quel objectif poursuit l’employeur en n’accordant pas par exemple, un avantage à des travailleurs à temps partiel ? Ne pouvait-il atteindre son objectif de façon moins discriminatoire? Les moyens pour l’atteindre sont-ils appropriés et nécessaires ?

 

Ces exigences résultent de la jurisprudence de la CJCE mais le recours à cette notion n’a pas eu la même fonction en matière de libre circulation des travailleurs et en matière d’égalité entre les hommes et les femmes. Dans le premier cas, il s’agissait de ne pas porter atteinte à la libre circulation des  travailleurs migrants sans discrimination à raison de leur nationalité. Dans le second cas, la question centrale est la lutte contre les différences de traitement entre les hommes et les femmes et donc celle de la preuve de la discrimination. Et c’est dans ce domaine que la CJCE a été la plus innovante en élaborant un processus probatoire, construit au fil des arrêts, et repris dans la directive 97/80.

 

L’arrêt de principe est l’arrêt Bilka du 13 mai 1986[23]. Dans cette affaire, une société de grands magasins avait institué un régime de pensions d’entreprise pour ses employés. Les travailleurs à temps partiel ne bénéficiaient de ce régime qu’à la condition d’avoir travaillé à temps plein au moins 15 ans sur une période de 20 ans. Une salariée a demandé à bénéficier de cette pension alors qu’elle ne remplissait pas la condition posée qu’elle estimait discriminatoire. La question posée à la CJCE était de savoir si cette mesure n’était pas indirectement discriminatoire puisque les travailleurs à temps partiel étaient majoritairement des femmes. Ce à quoi la Cour répond :

 

“ L’article 119 est violé lorsqu’une mesure frappe un nombre beaucoup plus élevé de femmes que d’hommes, à moins que l’entreprise n’établisse que la mesure s’explique par des facteurs objectivement justifiés et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe ”.

 

L’employeur doit alors justifier sa politique en montrant la légitimité de son objectif et la proportionnalité des moyens (c’est-à-dire “ appropriés et nécessaires ”).

 

Ainsi, pour identifier les mesures, neutres en apparence mais susceptibles d’être interdites, la CJCE a utilisé comme critère l’impact disproportionné d’une mesure : lorsqu’une mesure apparemment neutre “ affecte une proportion nettement plus élevée de personnes d’un sexe ”, la mesure sera considérée comme suspecte, fera présumer une discrimination, à moins que l’auteur ne la justifie. La dimension sociologique, à savoir la situation minorée des femmes sur le marché du travail qui se traduit par la mesure statistique, révèle la discrimination. C’est cette conception qui est reprise dans l’article 2 de la directive 97/80, mais imparfaitement car le texte fait référence aux “ moyens  appropriés et nécessaires ” avant même que ne soit examinée la finalité de la mesure et indépendamment de toute discrimination sexiste. Des moyens en effet peuvent être appropriés et nécessaires alors que seul l’examen de la légitimité de l’objectif aurait fait apparaître qu’il était illégitime.

 

La directive 2000/43 ne reprend pas la même définition de la discrimination indirecte. L’article 2 (par.2b) dispose “ une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une race ou d’une origine ethnique donnée par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires ”.

 

La structure est commune aux deux définitions. Dans les deux cas, la méthode d’analyse est comparative et s’attache à mesurer a posteriori les effets de la mesure en cause sur des groupes de personnes. Mais le critère est différent. Si, pour analyser les discriminations à raison du sexe, l’approche est quantitative (statistique), la nouvelle directive emprunte au domaine de la libre circulation des travailleurs migrants des critères qualitatifs liés aux caractéristiques propres de ces groupes.

 

1)      Il est permis de penser que la formulation recherchée est destinée à trouver une définition unique de la discrimination indirecte et qu’une définition large permet de couvrir les autres motifs énumérés dans l’article 13 du Traité d’Amsterdam, définition qui sera utilisée dans la “ directive emploi ”. La dimension statistique en effet ne serait guère utile pour faire présumer une discrimination indirecte... à raison de l’état de santé ou de l’orientation sexuelle, par exemple.

 

2)      On peut penser également que la CJCE décidera du critère pertinent pour révéler telle ou telle  discrimination. Il n’y aura plus obligation d’apporter des données statistiques[24] mais, dans certains cas, elles pourront s’avérer les plus pertinentes pour révéler le désavantage occasionné par une mesure, un critère ou une pratique. Dans un arrêt REGINA/ Nicole SEYMOUR du 9 février 1999, la Cour de justice avait cherché à réduire l’importance du  critère des données statistiques en montrant que si celles-ci, en l’espèce, “ révélaient un écart moindre mais persistant et relativement constant au cours d’une longue période entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins qui remplissent la condition de deux années d’emploi ”, une telle situation révélerait une apparence de discrimination. Dès lors, il appartiendrait au juge national d’apprécier les conclusions à tirer de telles données statistiques[25].

 

3)      Par ailleurs, les formulations de la CJCE ne sont pas constantes s’agissant du cadre d’appréciation d’une mesure apparemment neutre. Le cadre de la comparaison doit être suffisamment large et se faire entre groupes comparables, composés majoritairement mais pas exclusivement de travailleurs de l’un et l’autre sexe. Ce cadre d’appréciation doit porter sur des ensembles plus ou moins grands. Mais comment les choisir ? Cette étape est décisive pour permettre de présumer une discrimination. Elle repose sur le salarié qui a besoin d’aide. Dans les affaires portées devant la CJCE, le salarié était soutenu soit par une organisation syndicale, soit par une agence spécialisée.

 

Enfin, la définition retenue par la directive 2000/43 du 29 juin 2000 ne retient pas de manière centrale la référence aux données statistiques pour révéler la discrimination indirecte, même si elle ne l’exclut pas. Cette solution évite de trancher le débat né en France, selon lequel les données statistiques ne pourraient pas être utilisées en raison des exigences constitutionnelles qui disposent que la France assure “ l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion ” (article 1 de la Constitution du 4 octobre 1958). Le critère de l’identification des groupes de personnes discriminées est à définir de manière ad hoc devant le juge, à l’occasion de chaque affaire judiciaire.

 

Il s’agit donc d’une construction a posteriori et non d’une identification a priori des personnes. En effet, l’employeur a le privilège du préalable. Dans cette perspective, l’utilisation d’un critère met en lumière les groupes de personnes discriminées (plusieurs critères peuvent être combinés entre eux, par exemple : les personnes systématiquement non embauchées sont de couleur et portent un patronyme “ d’origine africaine ”). Il peut donc être demandé à l’employeur, comme pour les autres discriminations, de justifier sa politique d’embauche.

 

Le “ testing ” (test de situation) relève de cette démarche. Quelque soit le domaine concerné (accès à l’emploi, à un lieu de loisirs…), le groupe de personnes  discriminées est identifié par un critère défini a posteriori qui peut être différent suivant les cas d’espèce.

 

LA DISCRIMINATION APPARENTE est utilisée par la Cour de justice dans l’arrêt Enderby[26] et remplit une double fonction.

 

Au regard de la preuve d’abord : “ la charge de la preuve peut être déplacée pour ne pas priver les travailleurs victimes de discrimination apparente de tout moyen efficace de faire respecter le principe d’égalité ”. Mais, les phénomènes discriminatoires ne peuvent tous être imputés à l’employeur, ni aux négociateurs. En l’espèce, les négociations collectives menées séparément pour les emplois considérés ne faisaient pas apparaître des discriminations à l’intérieur de chacun des deux groupes. Les résultats décalés des négociations mettaient en évidence des différences de traitement pour des emplois de valeur égale relevant du même employeur et du même syndicat. Cette situation résultait des représentations que les acteurs pouvaient avoir intégrées quant à la valeur des fonctions en cause.

 

A coté de ce premier sens, que l’on peut qualifier de faible, des discriminations résultent des pratiques et idéologies à l’œuvre au niveau du marché du travail, des institutions mais aussi, d’une manière plus générale, de la société[27]. On qualifie ces discriminations de systémiques. Mais elles ne sont pas le résultat d’un système sans acteur. Elles impliquent aussi des justifications[28].

 


2- LA PREUVE DE LA DISCRIMINATION

 

L’article 4  par.1 de la directive 97/80, comme l’article 8 de la directive 2000/43, donne la même règle de preuve :

 

“ Les Etats membres prennent les mesures nécessaires, conformément à leur système judiciaire, afin que, dès lors qu’une personne s’estime lésée par le non respect à son égard du principe de l’égalité de traitement et établit, devant une juridiction ou une autre instance compétente, des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu’il n’y a pas eu violation de l’égalité de traitement ”.

 

Les arrêts de référence en la matière sont les arrêts Danfoss du 17 octobre 1989 et Enderby du 13 décembre 1993[29]. La Cour fait remarquer que, s’il appartient normalement à la personne qui allègue des faits à l’appui de sa demande d’apporter la preuve de leur réalité, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la charge de la preuve peut être déplacée “ lorsque cela s’avère nécessaire pour ne pas priver les travailleurs victimes de discrimination apparente de tout moyen efficace de faire respecter le principe d’égalité ”.

 

Ce processus probatoire a suscité des résistances en France. La référence à la règle de droit commun de la preuve selon laquelle “ la preuve incombe aux demandeurs ”[30] était invoquée pour écarter toute répartition de la charge de la preuve. Mais l’article 1315 du Code civil auquel il est fait référence comporte un alinéa 2 selon lequel “ celui qui se prétend libéré d’une obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ”. La règle communautaire n’est pas incompatible avec cette règle française qui est appliquée en matière de droits fondamentaux. C’est la crainte de procès multiples qui explique pour partie les résistances. Mais la difficulté de la première étape du processus probatoire est de nature à éviter tout risque de procédures abusives.

 

Quoiqu’il en soit, ce processus probatoire a été mis en œuvre par la Cour de cassation dans deux arrêts du 23 novembre 1999 et du 28 mars 2000[31]. Il fait également l’objet de la récente proposition de loi du groupe socialiste en matière de discrimination[32], non seulement concernant la discrimination à raison du sexe mais pour tous les motifs de discrimination.  

 

Ces nouvelles règles de preuve sont évidemment essentielles pour permettre enfin un  traitement judiciaire de la discrimination. C’est au nom de l’efficacité de la lutte contre les discriminations que le droit communautaire les a construites. C’est au juge national, seul en mesure d’apprécier les situations de fait, de les mettre en œuvre concrètement pour réduire l’ampleur des phénomènes discriminatoires.  


3°) TRAITEMENT CIVIL ET TRAITEMENT PENAL DES DISCRIMINATIONS

 

1 – D’un point de vue quantitatif, le contentieux de la discrimination tant pénal que civil est extrêmement faible. Non pas qu’il n’y ait pas de discriminations, mais elles sont traitées sous d’autres qualifications et notamment le licenciement.

 

La discrimination “ à raison de la race ou de l’origine ethnique ” est essentiellement traitée sur le terrain pénal, mais dans une proportion peu significative au plan statistique[33]. Le traitement civil est infime. Et seulement deux arrêts ont été rendus par la Chambre sociale de la Cour de cassation en 10 ans[34].

 

Les autres motifs de discrimination ne sont guère mieux traités en raison des difficultés de preuve, tant au plan pénal qu’au plan civil. Les discriminations fondées sur le sexe disposent des “ outils ” du droit communautaire depuis plus de vingt ans, mais ceux-ci n’ont guère été mobilisés. Ce qui explique l’adoption de la directive 97/80 du 15 décembre 1997 qui améliore la visibilité de ces outils et se traduit par la proposition de loi du groupe socialiste opérant notamment un déplacement de la charge de la preuve[35].

 

Seules les discriminations syndicales, parce que sont mobilisés les outils du droit communautaire qui pourtant ne leur étaient pas destinés, commencent à être mieux combattues.

 

La Cour de cassation a rendu depuis quelques mois plusieurs arrêts en la matière. L’on pourrait citer également l’affaire Peugeot et la négociation qui s’en est suivie[36].

 

 

2 – La transposition de la directive du conseil 97/80 du 15 décembre 1997 relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination à raison du sexe, introduit dans notre système juridique “ un acquis communautaire ”, c’est-à-dire des concepts que le droit français n’appliquait pas. Il ne s’agit pas ici d’une simple superposition de textes dans la mesure où le droit communautaire prime sur les droits nationaux. Il s’agirait plutôt d’une greffe, le droit communautaire devant influencer et s’intégrer au droit national. Le poids respectif du traitement pénal et du traitement civil de la discrimination vont s’en trouver modifiés. On peut parler d’interaction.

 

Cette interaction existe déjà. Elle s’est manifestée récemment sur le fond du droit par l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 14 juin 2000, où la Cour préconise la méthode comparative appliquée également par la chambre sociale[37]. Mais elle s’est aussi manifestée en matière de procédure. En effet, lorsque le préjudice est issu d’une infraction pénale, la victime a le choix d’exercer son action civile devant la juridiction civile ou devant la juridiction pénale (articles 1, 2 et 3 Code de procédure pénale). Ainsi faut-il choisir le forum du débat judiciaire. Le régime juridique des preuves en matière pénale, en particulier le principe de liberté des preuves (art. 427 Code de procédure pénale), peut constituer un critère du choix opéré en faveur de la voie pénale puisqu’a priori toutes les preuves, y compris celles qui ont pu être obtenues illicitement, peuvent être présentées au juge. En revanche, la procédure civile connaît un régime organisé des preuves qui peut freiner l’enquête dans le cadre de l’action exercée au civil.

 

Les outils d’enquête en matière civile sont de ce fait peu usités et leur mise en œuvre reste en voie de construction : les juges sont réticents à accorder les demandes d’instructions ; elles ne sont pas automatiques ; les documents requis doivent être transmis par la partie adverse et ne sont pas saisis sur place comme le permet le Code pénal ; les témoins sont plus difficilement contraignables. Par ailleurs, la preuve civile offre de plus grandes possibilités d’analyse et de construction qui permettent d’avoir gain de cause même en l’absence d’aveu écrit ou verbal en présence de témoins.

 

Aujourd’hui, les rapports entre les deux voies sont en pleine évolution. En premier lieu, l’infraction de discrimination est rattachée, dans le Code pénal, à la catégorie pénale des infractions d’atteinte à la dignité humaine qui induit que seuls certains comportements peuvent être poursuivis pénalement. En particulier, les discriminations dites indirectes (cf. droit communautaire) ne peuvent pas être appréhendées par le droit pénal.

 

Cette voie procédurale ne peut donc constituer le mode normal de traitement des discriminations ; elle est pourtant apparue telle pendant longtemps en raison de la faiblesse du traitement civil des discriminations. Cette faiblesse tenait jusqu’ici pour l’essentiel à la nécessité pour la personne discriminée d’apporter la preuve de la discrimination. Isolée et privée de véritables moyens d’investigation (à la différence du juge d’instruction), la victime ne pouvait guère obtenir une reconnaissance judiciaire du délit.

 

Or, de son côté, la voie civile devrait devenir plus ouverte car plusieurs évolutions modifient aujourd’hui la perspective.

 

 

A- DES PERSPECTIVES FAVORABLES AU DEVELOPPEMENT CIVIL DE LA DISCRIMINATION

 

Les textes en cours d’adoption comportent plusieurs dispositions relatives au traitement civil de la discrimination. Ce sont donc les actions portées devant les juridictions civiles qui devraient se trouver facilitées.

 

Le droit communautaire est un moteur essentiel de ces évolutions qui s’inscrivent dans un contexte de droit interne, lui-même évolutif et favorable au traitement civil de la discrimination. Outre les nouvelles règles qui répartissent la charge de la preuve entre salarié et employeur, il faut souligner l’évolution de notre droit qui affirme la nullité des actes discriminatoires comme principe de référence.


Si l’on ajoute les possibilités d’intervention rapide du juge civil par le développement de certaines procédures comme le référé, le traitement civil bénéficie aujourd’hui de conditions favorables à son développement. Cependant, ces évolutions sont relativement récentes, sur une échelle de vingt ans. Or, les règles de droit n’ont pas d’efficacité par elles-mêmes si elles ne sont pas mobilisées. Dès lors, la question centrale devient celle des acteurs aptes à se saisir de ces nouveaux outils. Espérons que les délais ne seront pas trop longs.

 

Ce développement potentiel des actions civiles pour discrimination ne doit cependant pas conduire à un abandon des actions pénales qui, pour couvrir un champ plus étroit des phénomènes discriminatoires, n’en constituent pas moins un outil essentiel de sauvegarde des valeurs démocratiques de notre société.

 

 

B- DIFFICULTE ET NECESSITE DU TRAITEMENT PENAL DES DISCRIMINATIONS

 

-         Un champ plus réduit que celui des actions civiles

 

Le régime juridique de la discrimination pénale est étroitement circonscrit par la définition du délit prescrite par le Code pénal (articles 225-1 et 225-2[38]). Celle-ci ne couvre pas la totalité des comportements discriminatoires. Elle ne vise que la discrimination intentionnelle que le législateur a choisi de qualifier de délit dans des circonstances précises.

 

Les comportements discriminatoires visés sont en outre limitativement énumérés par le Code pénal. C’est ainsi que les discriminations relatives au déroulement de carrière, aux conditions de travail, de rémunération, d’accès à la formation professionnelle, d’affectation, de qualification, de classification, de mutation etc., sont exclues du champ de l’article 225-2 CP.

 

Pour que la discrimination soit qualifiée de pénale, le parquet et/ou les victimes doivent en outre être en mesure d’apporter une preuve d’intention caractérisée directement imputable à la personne poursuivie. Ainsi, l’exigence de la preuve de l’intention est particulièrement lourde dans un contexte où :

 

-         L’auteur de la discrimination est difficilement identifiable ;

 

-         Il s’agit d’établir que la décision à l’origine de l’acte ou de la décision du prévenu (non embauche, absence de progression professionnelle, choix d’un autre locataire) est fondée sur des motifs discriminatoires.

 

La présomption d’innocence a pour effet de dispenser la personne suspecte de prouver son innocence. Elle impose la preuve de l’intention, de l’acte et du motif discriminatoire. L’intention seule sera insuffisante à conduire à une condamnation, et l’acte seul aussi[39]. De même, une décision discriminatoire sans auteur identifiable échappera à la sanction pénale.

 

Les parquets ont tendance à évaluer la suffisance des preuves à charge en tenant compte essentiellement de preuves directes sous forme de témoignages, d’aveux ou de déclarations dont la preuve peut être faite oralement ou par écrit.

 

Or, les témoins restent silencieux et sont réticents à donner leur concours à la victime de discrimination. Souvent locateur, employeur, commerçant, client, le discriminant est en contact quotidien avec le témoin. Aucune disposition générale ou spécifique du Code pénal ou du Code du travail ne met en place de dispositif qui protège les témoins ou le plaignant contre les représailles, sauf en cas de discrimination fondée sur le sexe à l’article L123-5 du Code du travail[40]. Seul l’article 62-1 du Code de procédure pénale prévoit qu’une personne susceptible d’apporter des preuves puisse déclarer l’adresse du commissariat comme adresse de domicile afin qu’elle ne puisse être localisée par le prévenu. Ce dispositif ne protège pas le témoin ou le plaignant connu du prévenu.

 

Ce silence est le principal obstacle à la répression effective du délit. L’isolement de la victime est incontournable.

 

La plupart du temps, le geste discriminatoire qui correspond à la définition du Code pénal ne laisse pas de traces suffisantes pour qu’il soit sanctionné. Doit-il pour autant rester impuni ? Voilà l’enjeux de la question posée par le débat sur la charge de la preuve en matière de discrimination pénale.

 

 

-         Une faible mobilisation des parquets

 

La circulaire du 16 juillet 1998 du Ministère de la Justice insiste sur la nécessaire concertation entre le parquet et les associations de lutte contre le racisme. Rappelons que cette exigence figurait déjà dans les précédentes circulaires du Ministère (cf. Circulaires du 6 .07.1989 et du 16.12.1992). La circulaire du 16 décembre 1992 préconisait plus concrètement des réunions de travail entre le Ministère public et certains spécialistes, associations et représentants des barreaux, lieux d’échange et de bonnes pratiques.

 

La quatrième Section du Parquet de Paris, composée de magistrats spécialisés en matière d’infractions à caractère raciste, s’est engagée dans cette voie de manière exemplaire. Force est de constater qu’ailleurs, la concertation est encore en construction ou inexistante. D’une manière générale, la LICRA, le MRAP et SOS Racisme soulignent qu’à l’exception de quelques parquets, la circulaire du Garde des Sceaux de 1998 adressée aux parquets est restée insuffisante pour les sensibiliser à la lutte contre les discriminations.

 

Les forces de police constituent le premier obstacle au recours. La principale source d’information du parquet est la police judiciaire. Or, plusieurs commissariats refusent de recevoir les plaintes de discrimination ou de se déplacer suite à un signalement et la plupart des plaintes déposées par les victimes au commissariat étaient prises en main courantes jusqu’à la prohibition de cette pratique, qui date de la loi présomption d’innocence de juin dernier, ce qui signifie qu'elles n’étaient jamais transmises au ministère public[41].

 

Lorsque le parquet étudie les plaintes, le ratio des poursuites en matière de discrimination est le même que pour les autres infractions pénales. Leur nombre reste cependant moindre en raison des réticences des acteurs à porter plainte et du manque de reconnaissance du délit comme délit à part entière par les commissariats de police et plusieurs parquets. Sur dix affaires par an à Paris, le parquet initie trois poursuites.

 

Ainsi, les pratiques des parquets constituent le deuxième obstacle au recours. Dans plusieurs départements, les commissariats ne transmettent pas les plaintes, les parquets n’informent pas les victimes du fait que la plainte leur a été transmise ou qu’elle a été reçue, du fait qu’elle reste sous étude, fasse l’objet de mesures d’enquête ou qu’elle soit classée. Toutes ces décisions n’étant pas motivées et prises à l’insu du plaignant, il n’est pas en mesure d’intervenir ou de les contester, de procéder à une plainte avec constitution de partie civile ou à une citation directe pour poursuivre l’affaire.

 

Ce classement se fait-il après que toutes les mesures utiles d’enquête aient été épuisées ? L’analyse des jugements pénaux révèle que le procès pénal fait trop souvent suite à une constitution de partie civile initiée par les associations en réponse à un classement sans suite du parquet. Les parquets investissent peu l’enquête et exigent de la victime qu’elle leur transmette des preuves directes. Leur passivité constitue une véritable démobilisation face au délit de discrimination qui, de fait, marginalise le recours et conforte l’impunité.

 

Finalement, la faible intensité des sanctions requises et ordonnées en matière de discrimination rappelle le combat qui a été mené quant à la signification symbolique de l’insignifiance des sanctions en matière de viol. Elle perpétue une dévalorisation de l’importance attachée aux crimes contre les personnes par opposition aux crimes contre les biens et souligne le peu de gravité attaché au délit de discrimination. Les délinquants reçoivent presque systématiquement des peines avec sursis ou de faibles amendes, sans conséquences sur leurs droit civiques, qui portent la gravité du délit en dérision au niveau du système répressif et des délinquants. Trop souvent, la sanction n’a pas l’effet dissuasif recherché sur les discriminants et s’absorbe aisément comme frais d’opération.

 

 

Malgré l’étendue des pratiques discriminatoires, l’appareil judiciaire impose de telles exigences de preuve à la victime avant de s’engager dans la répression du délit de discrimination, qu’elle incarne une démobilisation institutionnelle face à la répression de la discrimination. Alors que le recours pénal doit incarner une dénonciation et une répression de ce délit par l’Etat, la poursuite du recours dépend aujourd’hui des initiatives et de la persistance de la victime et des associations.

 


 

-         Une répression nécessaire à forte valeur symbolique

 

La répression pénale des discriminations est un indice fort du degré de réprobation que la société manifeste à l’égard de comportements socialement répréhensibles. De ce point de vue, la faiblesse de la répression actuelle de ce délit peut légitimement interroger. S’il n’est pas question de préconiser une utilisation systématique de la voie pénale comme mode normal et habituel de traitement des discriminations, son quasi-abandon doit être redouté. La voie pénale doit même être privilégiée lorsque la discrimination opérée apporte un trouble à l’ordre public par son ampleur et/ou sa gravité, mesurée en référence à l’atteinte aux valeurs démocratiques de la société. Il en est souvent ainsi de la discrimination raciale.

 


 

4°) QUELS ACTEURS POUR LUTTER JURIDIQUEMENT CONTRE LES DISCRIMINATIONS ?

 

Il ne faut pas sous estimer la difficulté pour la personne discriminée de franchir la première étape du processus probatoire qui résulte du dispositif analysé.

 

La personne discriminée doit être en mesure de rassembler un ensemble d’éléments de faits susceptibles de faire présumer la discrimination, en tout cas de convaincre le juge qu’il convient de solliciter la justification de l’employeur. C’est précisément là que se situent de grandes inégalités selon les personnes discriminées et les motifs de la discrimination. L’isolement de la personne discriminée est un facteur de faiblesse car il rend difficile le rassemblement des données significatives.

 

La discrimination syndicale, souvent citée, apparaît comme révélatrice de cette difficulté. Longtemps, de telles situations de discrimination ont été vécues comme des fatalités jusqu’au jour très récent où cette situation a été perçue comme intolérable et où l’évolution des règles de preuve a permis d’obtenir des décisions judiciaires favorables aux victimes. Ces décisions ne sont pas le fruit du hasard. Elles s’expliquent par le fait que ces discriminations sont traitées d’emblée sur le terrain collectif, le syndicat et la structure militante de l’entreprise, les institutions représentatives du personnel, ce qui permet de rassembler les éléments nécessaires au traitement du dossier. Le syndicat a ici plusieurs fonctions : il reçoit, fait des recherches, instruit, a des pouvoirs d’investigations. En réalité, il sait “ lire ” les situations  de faits.  Les militants sont insérés dans un collectif. Le lien s’opère entre la situation individuelle et un cadre susceptible de constituer une expérience sur ces questions.

 

Si les discriminations syndicales sont aujourd’hui combattues avec une plus grande efficacité (même s’il reste néanmoins beaucoup à faire), l’existence d’une structure collective d’appui aux personnes discriminées apparaît comme déterminante pour engager ces actions. La question des acteurs collectifs est donc inséparable de la lutte contre les discriminations. Un bref tour d’horizon des intervenants dans ce champ d’action montre une certaine dispersion des efforts et une insuffisance globale de prise en charge pour conduire un nombre significatif d’actions, notamment judiciaires, de lutte contre les discriminations.

 

 

LES  PRINCIPAUX ACTEURS

 

On peut distinguer trois types d’acteurs :

 

Ø      Ceux engagés dans un travail de terrain, recueillant les plaintes de victimes de propos ou de comportements racistes et/ou discriminatoires, les assistant dans le choix de la procédure la mieux adaptée à leur cas ;

Ø      Ceux chargés du recueil d’informations, d’études sur les discriminations et faisant des propositions en direction des pouvoirs publics ;

Ø      Ceux qui, notamment dans le monde du travail, sont chargés de contrôler l’application de la législation. 

 

Qu’il s’agisse des syndicats, des associations ou de l’inspection du travail, tous s’accordent pour souligner les limites de leur action[42]. Ces limites tiennent d’une part à l’état actuel du droit (problème de l’établissement de la preuve) et, d’autre part, à une prise en compte très variable des plaintes selon les parquets, malgré la Circulaire du Garde des Sceaux du 16 juillet 1998.

  

Les syndicats disposent de pouvoirs étendus d’action en justice au nom de l’intérêt collectif de la profession ( article L.411-11 du Code du travail). Ils peuvent non seulement assister les salariés devant les juridictions prud’homales mais joindre à l’action individuelle du salarié l’action du syndicat, au nom de l’intérêt collectif de la profession.

 

Le législateur a également prévu la possibilité pour le syndicat d’exercer dans certains cas limitativement énumérés, l’action individuelle des salariés, action dite de substitution, sous réserve d’obtenir l’accord de l’intéressé, et ce dernier gardant la maîtrise de l’action. Cette possibilité est prévue dans la proposition de loi qui sera prochainement discutée, pour les actions qui naissent de l’article L.122-45 du Code du travail, c’est-à-dire des actions engagées au titre d’une  discrimination. Souvent présentée comme un progrès décisif, cette voie procédurale doit être très fortement relativisée. L’intérêt de ce type d’action comparé à d’autres voies procédurales est quasi-inexistant et l’action de substitution n’est d’ailleurs pratiquement pas utilisée par les syndicats.

 

La réflexion devrait sans doute s’orienter vers l’adoption de voies procédurales plus collectives, de type “ action de groupe ”, qui permettrait d’éviter la multiplication d’actions individuelles pour le traitement de situations collectives, c’est-à-dire de situations dans lesquelles des personnes composant un groupe plus ou moins vaste sont placées dans la même situation. Il conviendrait de regarder ici du coté du droit de la consommation.

 

La mission généraliste des syndicats dans le traitement de toutes les discriminations trouve néanmoins des limites qui tiennent à leur implantation (quasi inexistante dans les petites entreprises) et au fait que le lieu privilégié de leur action reste l’entreprise. Ajoutons que certaines discriminations sont sans doute plus aisément prises en charge que d’autres, si l’on en juge par la faiblesse du contentieux relatif à la discrimination hommes/femmes par exemple. 

 

 

Les associations anti-racistes occupent un terrain spécialisé dans la lutte contre les discriminations. Si elles s’accordent pour constater la diminution des déclarations publiques racistes, elles dénoncent l’augmentation des plaintes pour discrimination. Leur appréciation rejoint celles du Haut conseil à l’intégration lorsqu’elles soulignent que les pratiques discriminatoires concernent des domaines de plus en plus nombreux -logement, loisirs, services bancaires, naturalisation etc. - et qu’elles se présentent comme un phénomène diffus, ne s’accompagnant pas nécessairement d’un discours raciste explicite.

 

Or, les associations n’ont qu’un pouvoir d’intervention de portée générale au titre de l’article 31 du Code de procédure ; il n’est pas prévu que le recours en substitution proposé aux syndicats par la proposition de loi soit accessible aux associations. Ainsi, aucun dispositif procédural ne prévoit le soutien des victimes face au recours civil en dehors du soutien syndical qui pourrait être disponible en certaines circonstances en matière de discrimination au travail.

 

Si la mise en place du 114 et des CODAC a été saluée comme un progrès dans la prise en compte et la lutte contre les discriminations, leur mission en matière de recours juridique n’en reste pas moins strictement définie. Le 114 a une vocation d’écoute à l’égard de la victime et de transmission du signalement aux Commissions d’accès à la citoyenneté (ci-après Codac). Institutionnellement, le 114 offre un outil pour identifier à la fois des zones où se concentre l’action discriminatoire, afin de moduler une intervention ciblée de l’administration, et la nature et l’objet des discriminations.

 

Quant aux Codac, elles reçoivent les fiches du 114, reprennent contact avec les appelants afin de repérer les signalements qui nécessitent intervention, d’assurer une coordination le cas échéant avec le parquet ou un accompagnement en cas de problèmes rencontrés avec l’administration. Elles n’ont pas vocation à offrir un soutien juridique continu à la victime quand celle-ci doit s’orienter vers un recours prud’homal ou civil.

 

En l’état actuel, le dispositif Codac – 114 n’a pas vocation à offrir un lieu indépendant de mise en place de recours juridiques. Cette mission semble pourtant de plus en plus déterminante dans la lutte contre les discriminations et complémentaire des actions nouvelles engagées depuis quelques mois : observation, sensibilisation, formation des fonctionnaires, aménagements législatifs, et mobilisation de l’appareil administratif de l’Etat.  Un tel constat souligne la nécessité de construire un maillon nouveau qui inscrit le rapport au droit dans la lutte contre les discriminations raciales.

 

Finalement, l’opérationalité juridique des Codac ne semble ne pas encore être parfaitement établie ou généralisée ; la présence des associations anti-racistes, prévue dans les textes et susceptible de sensibiliser à cette dimension juridique, n’est pas systématiquement assurée. De même, de nombreux observateurs soulignent l’absence de compétence juridique spécifique des personnels affectés aux Codac, en termes de lecture et de compréhension des phénomènes discriminatoires.

 

 

Les difficultés rencontrées par l’inspection du travail dans l’exercice de ses prérogatives reconnues par le Code du travail tiennent à l’état actuel du droit, qu’il s’agisse du droit pénal ou du droit du travail. 

 

L’impuissance de l’inspection du travail, malgré les pouvoirs étendus d’investigation qu’elle possède et le pouvoir de relever le délit de discrimination, a été soulignée avec force. Cette impuissance tient notamment à la difficulté d’établir la preuve de l’intention discriminante. A telle enseigne qu’en règle générale, les inspecteurs ont renoncé à utiliser ce pouvoir.

 

Il convient de permettre à l’inspection du travail d’être plus efficace en matière d’enquête sur les discriminations dans l’emploi. Deux réformes préconisées par le Conseil Economique et Social mériteraient d’être mises en œuvre[43].

 

Dans l’état actuel du droit du travail, les inspecteurs n’ont accès qu’aux documents explicitement désignés et énumérés dans le Code du travail. Un employeur peut légalement refuser de présenter les fiches d’appréciation des salariés ayant saisi l’inspecteur du travail d’une plainte pour discrimination[44]. La liste des documents que l’inspecteur du travail peut se faire présenter a été étendue en matière de temps de travail (art. L611-9 Code du travail) et de travail dissimulé (article L321-12 du Code du travail). Les inspecteurs du travail devraient être en droit d’exiger la production de tout document existant dans l’entreprise qu’ils estiment nécessaires de consulter dans le cadre de leur enquête (cf. dans le même sens la proposition de la CGT de l’établissement d’un “registre obligatoire des embauches comportant un certain nombre d’indications suffisamment significatives tenu à la disposition de l’inspecteur du travail et des délégués du personnel”). 

 

D’autre part, les constatations des inspecteurs du travail devraient être tenues à la disposition des délégués du personnel et des victimes de discrimination de l’entreprise. Les limites imposées à la communication des actes administratifs ont aujourd’hui pour effet de protéger les comportements discriminatoires. Présentement, seules les constatations en matière de santé-sécurité sont accessibles aux représentants du personnel au CHSCT. 

 

 

 

UNE NOUVELLE INSTANCE ?

 

Les études sont unanimes : il est admis que les discriminations présentent un caractère par nature cumulatif. Elles ne sont pas la somme d’actes isolés et individuels mais plutôt le produit d’un processus[45] .

 

Comment lever ce hiatus entre des plaintes individuelles toujours plus nombreuses et les pratiques discriminatoires que toutes les études sociologiques analysent comme des effets de système ? Ou, autrement dit, à quel niveau et dans quel lieu articuler en les rendant visibles les dimensions individuelle et collective des discriminations ? Comment, pour reprendre les termes du rapport Belorgey, “ sortir du dilemme “innocenter/punir” et de sa variante administrative “couvrir/punir” ” ?

 

Les dispositifs mis en place ces dernières années révèlent la prise en compte par les pouvoirs publics de la montée en puissance des discriminations. Eu égard à leurs objets et à leurs missions, l’ensemble des institutions mises en place ces derniers mois en matière de lutte contre les discriminations raciales, Codac, GELD – 114,  sont utiles et doivent être préservées. Pourtant, dans la construction des recours juridiques, un maillon reste manquant, et ce constat déborde le stricte champ de la discrimination raciale pour concerner l’ensemble des discriminations.

 

La complexité juridique des discriminations ne peut être levée par des actions ponctuelles de formation des membres des différentes institutions. Pour assurer le respect du principe d’égalité, dont la lutte contre les discriminations est une des dimensions, l’outil juridique est indispensable. C’est pourquoi les modifications législatives sont nécessaires et prennent très largement appui sur la construction communautaire. Mais changer la loi n’est pas suffisant, puisqu’il s’agit de concepts nouveaux dans le droit français. Il est donc apparu nécessaire qu’existe un lieu nouveau, fonctionnant comme un laboratoire, capitalisant les expériences et proposant une lecture des discriminations, quelle que soit leur forme - raciale, sexiste, syndicale, à raison de l’orientation sexuelle … - au travers d’une construction conceptuelle qui échappe aux exigences des débats et conjonctures politiques. Il s’agirait d’une instance qui élabore et propose aux acteurs sociaux des stratégies juridiques et/ou judiciaires, et qui permettrait de rompre ainsi avec un traitement juridique parcellisé des discriminations, au moment où le droit communautaire invite à une approche transversale.

 

Si l’objectif majeur de la lutte contre les discriminations reste la modification des pratiques sociales, la mise en place d’une instance autonome dotée de pouvoirs d’investigation et présentant des garanties d’indépendance apparaît comme une nécessité : privés de lieu de concertation et de construction depuis vingt ans, les recours juridiques en matière de discrimination fondée sur le sexe se sont avérés marginaux et peu efficaces. Ce lieu de rassemblement des connaissances permettrait la construction d’une approche systématisée et coordonnée du traitement judiciaire des discriminations.

 

Ainsi définies, les missions d’une telle instance montrent à l’évidence qu’elle ne saurait être perçue comme concurrente des institutions judiciaires, qui continueront d’être les seules à prononcer les sanctions et à indemniser les préjudices. De la même manière, elles ne se substitueraient pas aux associations ni aux syndicats qui restent les plus proches des problèmes de terrain, et donc les seuls à même d’accompagner et d’assister les victimes de pratiques discriminatoires.

 

L’élaboration et la mise en place d’une nouvelle instance est un enjeu majeur pour optimiser les efforts de construction et de réflexion sur le dispositif juridique, investir les outils probatoires et soutenir les victimes de discrimination. Elle complèterait utilement ce qui a déjà été fait en matière de discrimination raciale et préfigurerait une approche harmonisée de la lutte judiciaire contre toutes les formes de discrimination[46].


II - LES DIFFICULTES DE LAPREUVE .  QUELQUES RECOMMANDATIONS

 

 

1°) LA PREUVE CIVILE

 

Malgré l’apport conceptuel du droit communautaire en matière de discrimination fondée sur le sexe, depuis vingt ans le contentieux civil en matière de discrimination sexiste n’a jamais réussi à se déployer en raison de la faible mobilisation des acteurs et de la charge de la preuve imposée à la victime. En matière de discrimination raciale, les résultats sont encore plus faibles pour des raisons du même ordre. L’approche communautaire a contribué à la mise en place d’un régime juridique qui peut être efficace, par extension jurisprudentielle, pour le traitement de la discrimination syndicale. Mais la mobilisation des “ outils ” juridiques  reste à opérer  pour les victimes de sexisme et de racisme.

 

Le célèbre adage “ idem est non esse et non probari ”, selon lequel il y a équivalence entre l’absence de droit et l’absence de preuve, résume bien la situation dans laquelle se trouvent les victimes de discrimination. Dans l’impossibilité de prouver la discrimination, tout se passe en effet comme si elles n’étaient pas titulaires du droit fondamental à l’égalité de traitement et la violation de leurs droits n’est pas reconnue.

 

Cet adage a le mérite de poser de façon brutale que le fait de ne pas avoir de droit et de ne pas pouvoir prouver la violation de ses droits sont des situations équivalentes. Quelle est la pertinence d’un ordre juridique qui rendrait les individus titulaires de droits sans leur donner les moyens d’en obtenir le respect par le biais du système judiciaire ? La traditionnelle formule de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) selon laquelle “ la Convention a pour objectif de consacrer des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs ” rappelle que l’effectivité est une condition de la légitimité de tout ordre juridique[47].

 

La directive 97/80 du Conseil de l’Union européenne du 15 décembre 1997 relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le sexe a été adoptée en réponse à l’inertie des juridictions nationales, afin de les contraindre à mettre en œuvre les règles de preuve du droit communautaire en matière de discrimination fondée sur le sexe. Par ailleurs, le Conseil de l’Union européenne a adopté le 29 juin 2000, une directive relative à la mis en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique, qui, à l’article 8,  reprend la même formulation.

 

La directive communautaire 97/80 sera transposée par la Proposition de loi du groupe socialiste reprenant les éléments du Projet de loi de modernisation sociale en matière de preuve de la discrimination. L’article L. 122 - 45 du Code du travail disposerait à l’avenir qu’en cas de litige relatif à la discrimination fondée notamment sur la race et l’origine :

 

 “[…] le salarié concerné ou le candidat à un recrutement présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ”.

 

On aurait tort de penser que ces textes suppriment pour la victime toute difficulté de preuve de la discrimination. Une charge de preuve encore très lourde pèse sur elle. Il lui faudra présenter des éléments de faits laissant supposer l’existence d’une discrimination. Vu l’opacité du phénomène discriminatoire, cette charge pourrait très bien se révéler être un seuil inaccessible si l’accès aux preuves ne lui est pas facilité.

 

Or, si le droit européen par la CEDH et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme consacre un réel droit à l’égalité des armes entre les parties et leur droit d’accéder aux éléments de preuve leur permettant de faire valoir équitablement leurs prétentions, les règles procédurales et les pratiques des magistrats français en matière civile n’offrent aucun soutien aux victimes de discrimination et de surcroît leur nient bien souvent dans les faits l’accès à la preuve.

 

 

A- L’AFFIRMATION DU DROIT D’ACCES A LA PREUVE

 

1 -  Le principe de l’égalité des armes

 

L’article 6§1 de la CEDH consacre le droit à un procès équitable. La Commission puis la Cour européenne ont rapidement précisé le contenu de ce droit. L’équité procédurale implique l’égalité des armes entre les parties au procès, soit “ l’obligation d’offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause (y compris ses preuves) dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire. Il revient aux autorités nationales de veiller, dans chaque cas, au respect des conditions d’un procès équitable ”[48]. Les parties au procès sont donc en droit d’exiger de l’Etat qu’il fasse disparaître les pratiques et règles procédurales nettement désavantageuses pour l’une d’elles.

 

En matière de discrimination, cette obligation implique, au-delà d’une répartition de la charge de la preuve, un accès réel à la preuve avec les outils nécessaires pour assurer aux victimes un support institutionnel permettant un débat dynamique, un processus dans le cadre duquel la victime est soutenue dans sa recherche de preuve, qu’il s’agisse de la possibilité effective de présenter des témoins, d’un accès réel aux mesures d’instruction ou à une procédure d’expertise.

 

La CEDH consacre au profit de l’accusé le droit de comparaître personnellement et le droit d’obtenir la convocation et l’interrogation de témoins. Cependant, ces droits n’existent qu’en matière pénale. Pourtant, la Commission considère que l’exigence d’équité procédurale implique de ne pas les négliger en matière civile : le refus de tels droits dans certains procès civils pourrait violer le droit à un procès équitable. Il s’agit de ceux dans lesquels une partie est désavantagée en terme d’accès à la preuve et où la preuve des allégations est particulièrement difficile à faire.

 

2-   L’exigence d’impartialité

 

L’article 6§1 de la CEDH rend les justiciables titulaires du droit d’être jugés par un tribunal impartial. Un juge impartial est un juge sans préjugé. Cette impartialité doit non seulement être objective mais aussi subjective et se révéler à son comportement au procès. La justice doit être non seulement rendue, mais aussi donner le sentiment d’être rendue.[49]

 

Le procès impartial implique le déploiement d’un doute, celui d’un juge qui n’a pas d’opinion préétablie sur les faits qui lui sont soumis. Le doute est donc consubstantiel à l’impartialité. Mais si le juge a l’obligation de douter, le régime juridique doit assumer l’obligation de faire en sorte que la lumière soit faite sur les faits en cause dans le débat. Autrement dit, il doit permettre de lever le doute.

 

L’exigence d’impartialité implique nécessairement que le débat judiciaire soit dynamique et qu’il ne permette pas au défendeur de se complaire dans un rôle attentiste face à un demandeur s’efforçant en vain de faire la preuve de ses allégations. Car en effet, si l’impartialité implique que les justiciables aient le sentiment, au-delà de la réalité, que la justice a été rendue, comment pourrait-il en être ainsi si le juge et le défendeur n’ont d’autre rôle, comme c’est le cas trop souvent aujourd’hui, que celui d’attendre que le demandeur fasse la preuve de ses allégations, sans moyens d’accès à la preuve.

 

 

B-  LES VOIES D’AMELIORATION EN MATIERE CIVILE

                       

                        1- L’accès à la preuve

 

La discrimination est rarement visible au grand jour. C’est plutôt l’opacité qui la caractérise. Constituant un fait juridique, sa preuve est libre. Mais la liberté de la preuve n’est pas d’une grande aide pour établir la discrimination car la preuve doit être loyale, ce qui comme nous le verrons empêche la victime d’avoir recours à l’enregistrement clandestin ou à la production de certains documents. Ainsi, la liberté de la preuve se résume à une preuve testimoniale ou documentaire qui dans les faits est difficilement accessible.

 

A . L’accès aux témoins

 

La victime éprouvera des difficultés à trouver des personnes acceptant de témoigner à son procès et cette résistance s’explique. Il n’existe pas en France de régime juridique clair protégeant les témoins contre les représailles.

 

L’article 5 de la Convention OIT 158 concernant la cessation de la relation de travail à l’initiative de l’employeur[50], stipule que le fait d’avoir porté plainte contre un employeur ou d’avoir participé à des procédures ne constitue pas un motif valable de licenciement. La Cour de cassation a reconnu le 23 novembre 1994, que le témoignage d’un salarié ne pouvait être retenu comme une faute susceptible de fonder un licenciement et, le 14 mars 2000, que le fait de porter une faute de l’employeur à la connaissance de l’inspecteur du travail ne constituait pas un motif de licenciement[51]. Or, la protection offerte par ce principe est limitée : elle ne vise pas les autres sanctions possibles de l’employeur, ne couvre que le droit du travail, ne permet pas de demander l’annulation du licenciement intervenu et est peu connue, n’ayant pas été intégrée formellement au Code du travail.

 

Cependant, aucune disposition du Code du travail ou du Code pénal n’offre de dispositif pour protéger le témoin contre les pressions ou sanctions directes ou indirectes de l’employeur, du logeur ou de tout autre défendeur au procès en discrimination,.

 

Or, le témoignage est une obligation civique consistant en l’obligation de comparaître, de prêter serment et de dire la vérité. Mais cette obligation n’est pas assortie à l’heure actuelle des cadres juridiques permettant de la rendre effective. Quoique le refus de témoigner soit théoriquement sanctionné pénalement par l’article 434-13 du Code pénal, le risque de représailles explique l’impossibilité pour les salariés de témoigner.

 

L’intérêt qu’il y aurait à contraindre des salariés d’une agence immobilière à témoigner des pratiques d’attribution des logements en fonction de l’origine des clients ou encore d’interroger le personnel d’une direction des ressources humaines sur les pratiques de recrutement, reste de ce fait théorique. Sans affirmation systématique du risque pénal, des exigences de la justice et de protection des témoins, la victime est dans les faits privée de ce mode de preuve.

 

Or, dans l’article 9 de la Directive 2000/43 du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de “ race ” ou d’origine ethnique,  le Conseil impose la mise en place d’une protection des “ personnes ” contre les rétorsions en disposant que :

 

“ Les Etats membres introduisent dans leur système juridique interne les mesures nécessaires pour protéger les personnes contre tout traitement ou toute conséquence défavorable en réaction à une plainte ou à une action en justice visant à faire respecter le principe de l’égalité de traitement ”.

 

                B. La protection du droit d’agir en justice

 

Plus largement, il est nécessaire de protéger ceux qui décident d’agir en justice.

 

Le champ d’application des mesures discriminatoires est étendu par le projet de loi : il inclut, outre les procédures de recrutement et d’embauche, les mesures en matière de rémunération, de formation, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation. Cette extension se heurte immédiatement à un obstacle : la peur en agissant en justice de subir des représailles de l’employeur, se traduisant en particulier par le risque de perdre son emploi. Il est nécessaire de parer à cette difficulté obérant l’efficience du dispositif en accordant une protection à celui qui se dit victime d’une mesure discriminatoire.

 

L’article L. 123-5 du Code du travail prévoit, en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes :

 

“ Est nul et de nul effet le licenciement d’un salarié faisant suite à une action en justice engagée par ce salarié ou en sa faveur sur la base des dispositions du présent Code relatives à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, lorsqu’il est établi que le licenciement n’a pas de cause réelle et sérieuse et constitue en réalité une mesure prise par l’employeur à raison de l’action en justice. En ce cas, la réintégration est de droit et le salarié est regardé comme n’ayant jamais cessé d’occuper son emploi ”.

 

Cette protection particulière, à raison d’une discrimination sexiste, doit s’inscrire dans une démarche plus large consistant à protéger l’action en justice au nom d’impératifs jugés supérieurs au pouvoir de direction de l’employeur. Par ailleurs, elle correspond aux exigences de la CEDH, dans ses articles 5, 6 et 13[52].

 

L’article L. 123-5 ne semble pas toutefois offrir des garanties suffisantes ; du moins sa rédaction apparaît-elle confuse. Il faut franchir, à notre sens, un pas supplémentaire en posant une présomption de licenciement et/ou sanction dépourvus de toute cause légitime lorsque ces mesures font suite, dans le temps, au dépôt de la plainte du salarié. Si un tel mécanisme présomptif n’est pas habituel en droit du travail français, on le retrouve parfois dans les droits étrangers, en particulier lorsque le droit que le salarié entendait faire valoir – et qui lui a valu d’être évincé de l’entreprise – est jugé fondamental. On peut alors envisager que pendant toute une période, dont il convient de déterminer la mesure, l’employeur ne peut procéder au licenciement et/ou sanction du salarié qui a saisi le Conseil de prud’hommes en vue de faire établir une pratique discriminatoire de l’employeur en matière de formation, de qualification…Le licenciement et/ou la sanction prononcés pendant cette période de protection seraient présumés nuls car portant a priori atteinte à un droit fondamental. Il appartiendrait à l’employeur de renverser cette présomption en prouvant que le licenciement et/ou sanction reposent sur une autre cause, sans lien avec l’action en justice, dont les juges examineraient le caractère réel et sérieux.

 

Selon la jurisprudence actuelle, le licenciement d’un salarié prononcé par l’employeur à titre de représailles à la suite d’une action en justice, quelle qu’elle soit, est jugé sans cause réelle et sérieuse. Il faut aller plus loin en parlant de nullité du congédiement - facile à justifier car il s’agit de garantir deux droits fondamentaux combinés, le principe de non-discrimination et le droit d’ester en justice -, et en instaurant une présomption de licenciement illicite du fait de la concomitance entre la plainte et l’éviction. Si ce mécanisme paraît de prime abord porter une atteinte importante au pouvoir de direction de l’employeur, en réalité cela doit être nuancé : les droits fondamentaux constituent déjà une limite naturelle à l’exercice de ce pouvoir, et la Chambre sociale de la Cour de cassation s’impose comme en étant le garant.

 

Recommandations :

Þ    Ajouter à l’article L122-45 du Code du travail une disposition pour protéger les témoins et plaignants contre les représailles, au même titre que dans le contexte des protections offertes en matière de harcèlement sexuel et de discrimination fondée sur le sexe .

Þ    Prévoir la protection du droit d’agir en justice contre les représailles de la personne poursuivie.

 

C. Les mesures d’instruction

 

En matière de discrimination, la Proposition de loi qui sera discutée en principe le 12 octobre 2000 propose que l’article L122-45 du Code du travail contienne un nouvel alinéa disposant que “ le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utile. ”. Cependant, le droit aux mesures d’instructions utiles est déjà consacré à l’article 143  Nouveau Code de procédure civile (NCPC) :

 

“ Les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d’office, être l’objet de toute mesure d’instruction légalement admissible. ”

 

De plus, en vertu de l’article 145 NCPC, toute personne peut même demander une mesure d’instruction par requête ou référé avant tout procès afin de préserver la preuve.

 

 Or, ces principes généraux de la procédure civile n’ont jamais permis jusqu’ici, en matière de discrimination fondée sur le sexe ou sur l’origine ou la “ race ”, d’obtenir des mesures d’instructions massives permettant à la victime de compenser son isolement, désavantage stratégique qui se traduit par une quasi absence d’éléments de preuve.

 

Ce sont les conditions d’accès aux mesures d’instruction qui posent problème. La victime demeure confrontée au surcroît de travail des juges et à leur absence de familiarité avec le procédé probatoire en matière de discrimination. Cette résistance se traduit par un obstacle qui demeure entier : le refus des mesures d’instructions qui relèvent du pouvoir souverain d’appréciation du juge du fond.

 

L’instruction est un procédé d’administration de la preuve inscrit aux articles 143 et SS. du  NCPC qui a toujours été à la disposition des victimes de discrimination. L’amendement projeté à l’article L122-45 du Code du travail ne fait que réitérer un droit à la disposition de toute partie à un procès.  Le problème des victimes de discrimination ne se pose donc pas au plan du principe.

 

Les mesures d’instruction doivent être ordonnées par un juge. Elles ne le sont pas de plein droit. Elles sont facultatives et le juge n’est pas tenu de motiver spécialement son refus d’ordonner l’expertise ou la demande de documents sollicitée[53]. Il dispose donc d’un pouvoir souverain pour apprécier l’opportunité d’ordonner des mesures d’instruction. Ce pouvoir comporte certes certaines limites mais dans la majorité des cas, il échappe à tout contrôle de la Cour de cassation.

 

Or, l’article 146 NCPC définissant le contexte dans lequel une partie peut prétendre avoir droit à une mesure d’instruction, ferme la porte à l’utilisation de ce procédé pour compenser des carences de preuve :

 

“ Une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’élément suffisants pour le prouver.

 

En aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve ”

 

La nuance d’appréciation est mince.

 

Il est vrai que les principes posés par la jurisprudence de la Cour de cassation ouvrent certaines possibilités. Par exemple, dans un arrêt de principe de 1976, la troisième Chambre civile de la Cour de cassation affirmait :

 

“ Si les juges du fond disposent en principe d’un pouvoir souverain pour apprécier la pertinence d’une offre et l’opportunité d’une mesure d’instruction, il en est autrement lorsque les faits articulés, si leur existence était établie, auraient légalement pour conséquence inéluctable de justifier la demande.”[54]

 

Cependant les pratiques des tribunaux depuis 1976 en matière de discrimination fondée sur le sexe et de discrimination raciale ne permettent pas d’affirmer le droit de la victime de discrimination à avoir systématiquement recours aux mesures d’instructions pour étoffer un dossier pauvre. Les décisions courantes penchent plutôt du côté d’un refus d’instruction pour carence de preuve. Une mesure d’instruction peut aussi être refusée parce que le ou les juges s’estiment suffisamment informés sur les faits du litige pour rendre une décision. Le refus de la mesure d’instruction est sans recours.

 

Dans un contexte où la maîtrise par les acteurs et magistrats des procédés probatoires en matière de discrimination est peu développée, ce pouvoir d’appréciation met considérablement en péril le droit de la victime d’accéder à la preuve.

 

L’application correcte d’une règle de droit sans connaissance des faits n’est pas juridiquement possible s’il existe un moyen de lever le doute existant sur l’affaire. Or, ce moyen est tributaire d’une gestion éclairée des mesures d’instruction qui exige la mise en place d’un véritable encadrement en matière de discrimination et ce, bien au-delà de l’affirmation d’un droit à l’instruction qui a toujours existé.

 

L’office actif du juge a été reconnu par la Cour de cassation dans son arrêt du 28 mars 2000 [55] en matière de discrimination syndicale, en enjoignant véritablement au juge de vérifier les faits. La Cour y donne aux juges du fond un rôle actif dans la recherche de la preuve de la discrimination. Mais pour l’instant, malgré l’applicabilité de la méthode communautaire en matière de discrimination fondée sur le sexe depuis vingt ans, ce rôle actif du juge n’a été affirmé par la Chambre sociale qu’en matière de discrimination syndicale. Pourquoi ? Parce que l’on assiste à une mobilisation des acteurs syndicaux sur l’enjeu de la discrimination syndicale et à une familiarisation avec la construction de la preuve en cette matière qui autorise le recours à l’instruction comme mesure supplétive. Or, les pourvois en matière de discrimination fondée sur sexe continuent à échouer[56] : les dossiers sont insuffisamment construits ou encore n’offrent pas aux magistrats de preuves qu’ils acceptent de recevoir comme éléments maintenant le doute et autorisant l’approfondissement de la recherche des faits.

 

Recommandation :

-         Affirmer le droit aux mesures d’instruction en matière de recours civils en discrimination

 

D. La comparution en personne des parties au litige

 

On assiste aujourd’hui en matière civile, et particulièrement en matière prud’homale, à une pratique systématique d’administration de la preuve testimoniale par attestation, qu’il s’agisse de simples témoins ou des parties au litige. Lorsqu’une entreprise est mise en cause, elle est souvent représentée par son avocat et la personne mise en cause n’est pas toujours invitée à se présenter en personne. Ceci favorise le témoignage construit a posteriori, défavorise la sincérité et évite au représentant du défendeur de se soumettre à l’examen direct du juge.

 

On se prive ainsi d’un moyen d’instruction permettant de confronter les parties et de mieux apprécier leur sincérité.  La comparution en personne est un excellent moyen pour le juge d’approcher la vérité. Il suffit d’évoquer l’article 191 NCPC qui dispose “ les parties répondent en personne aux questions qui leur sont posées ” sans que leur avocat puisse les y aider, le but étant de s’assurer de la spontanéité des réponses, et donc de leur sincérité. Mais c’est encore l’article 198 NCPC qui permet de mesurer l’intérêt de recourir à la comparution personnelle. En effet, il dispose “ le juge peut tirer toute conséquence de droit des déclarations des parties, de l’absence ou du refus de répondre de l’une d’elles et en faire état comme équivalent à un commencement de preuve par écrit ”. Ainsi, la comparution en personne peut s’avérer un moyen efficace de percer l’opacité des faits en matière de discrimination.

 

E. Le rôle des acteurs en matière de soutien aux victimes

 

La proposition de loi succédant au projet de loi de modernisation sociale prévoit d’ajouter un article L122-45-1 au Code du travail et ouvre la possibilité pour les syndicats d’agir en lieu et place de la victime pour “ toutes actions qui naissent de l’article L122-45 du Code du travail en faveur d’un candidat à l’emploi ou d’un salarié de l’entreprise ”. 

 

Cette action de substitution requiert le consentement du salarié. Or, elle est peu utilisée et s’est avérée inefficace dans les domaines où elle existe déjà. En effet, elle ne permet pas au  salarié de garder l’anonymat et il reste donc toujours vulnérable aux pressions de l’employeur.

 

L’action de substitution ne met pas le syndicat dans une position substantiellement différente de celle dans laquelle  il appuie le recours individuel du travailleur en intervenant à l’instance comme partie jointe au nom de l’intérêt collectif de la profession. Cependant, l’appui du syndicat peut faciliter l’accès aux preuves pré-constituées dans l’entreprise.

 

Dans le cadre du projet de loi de modernisation sociale, aucun droit particulier n’est reconnu  aux associations de lutte contre le racisme, ce qui prive toute victime discriminée dans un cadre extérieur à la mobilisation syndicale, d’un appui effectif. En effet, les associations n’ont qualité pour assurer en justice la défense d’intérêts collectifs qu’en vertu d’un texte qui le prévoit expressément. Il serait souhaitable d’introduire une disposition permettant aux associations antiracistes d’ester en justice devant les prud’hommes et/ou d’intervenir dans la procédure au même titre que les organisations syndicales.

 

Recommandation :

-         En matière de recours civil en discrimination, permettre aux associations antiracistes d’ester en justice devant les prud’hommes et/ou d’intervenir dans la procédure au même titre que les organisations syndicales.

 

2- Les difficultés posées par certains modes de preuve

 

En droit français, non seulement la victime est désavantagée en termes d’accès à la preuve, mais certains modes de preuve qui pourraient lui être accessibles sont considérés comme irrecevables par la Cour de cassation. Il s’agit de la preuve par enregistrement sonore ou vidéo réalisé à l’insu de la partie adverse et de la preuve par photocopie de documents appartenant à l’entreprise. Quoique la CEDH ne réglemente pas la recevabilité des preuves[57], la recevabilité ou l’irrecevabilité d’un mode de preuve peut avoir des conséquences non négligeables sur le respect du principe de l’égalité des armes. 

 

            A- L’enregistrement réalisé à l’insu de la partie adverse

 

La Cour de cassation déclare l’enregistrement réalisé à l’insu de la partie adverse irrecevable en matière civile du fait de la déloyauté de cette pratique[58]. Elle induit de l’article 9 du NCPC l’exigence de loyauté dans l’administration de la preuve au delà de l’exigence de légalité du procédé d’accès à la preuve. Or, la question se pose de savoir si l’enregistrement ne devrait pas être recevable pour établir certaines discriminations particulièrement difficiles à prouver, par exemple au moment d’un entretien d’embauche. La recevabilité aurait le mérite de rééquilibrer une situation où la victime est dans la quasi impossibilité de prouver la discrimination[59].


        B- Les documents appartenant à l’entreprise

 

Par ailleurs, les preuves figurant sur les documents appartenant à l’entreprise ou ayant été photocopiés en possession de la victime sont essentiels à la construction de la preuve en matière de discrimination au travail ou dans l’accès au logement par exemple. Or, à cet égard, la production de ces éléments de preuve en dehors d’une mesure d’instruction est difficile.

 

La production en justice par le salarié de documents appartenant à l’entreprise, ou de leurs photocopies, constitue un vol au sens de l’article 311-1 du Code pénal depuis l’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation Logabax du 8 janvier 1979. Cette position de la Chambre criminelle ne s’est jamais démentie et a été confirmée dans un arrêt du 8 décembre 1998. Un salarié hésitera à obtenir de tels documents ou à les produire en justice de peur de se voir condamner pour vol. Cette jurisprudence protège l’entreprise contre l’exposition de ses pratiques et prive la victime de la possibilité de produire l’ensemble des éléments de preuves à l’appui de ses prétentions.

 

La Chambre sociale quant à elle n’ouvre pas totalement l’accès de la victime à ce type de  preuve, mais autorise dans certaines circonstances la production par le salarié des documents de l’entreprise : il peut produire, pour assurer sa défense dans le procès qui l’oppose à son employeur, les documents de l’entreprise dont il a connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions[60]. Cependant, au-delà, tout document concernant la gestion globale des ressources humaines ou d’autres aspects de l’entreprise demeurent inaccessible.

 

Or, pour contourner cette difficulté il serait essentiel de reconnaître le droit de la victime à requérir la transmission et la production au dossier de tout document pertinent aux faits mis en cause par le litige. En outre, une pratique systématique de transmission, en cours d’activité, de certains documents concernant les politiques de gestion des ressources humaines, de rémunération, d’évolution professionnelle, tendant à la transparence des pratiques internes, serait à la fois une mesure améliorant la gestion interne eu égard à la discrimination et reconnaissant le salarié comme acteur.

 

Recommandations :

 

-         Reconnaître un droit de transmission et de production au dossier à la victime de discrimination, relativement à tout document de l’entreprise pertinent au litige tel que formulé dans les actes de procédures.

 

Pour conclure laissons parler J.P. Margénaud pour qui “ s’il est vrai, comme l’a écrit M.A. Frison-Roche, que le procès a désormais ‘ pour fonction de permettre au juge de prendre appui sur des faits le plus vraisemblablement reconstitués pour appliquer la règle de droit de la façon la plus adéquate afin qu’en résulte la décision la plus juste possible, apte par cela à neutraliser la violence et à ramener la paix sociale’ , il est clair que la phase de reconstitution des faits doit être organisée avec le même soin et les mêmes garanties que la phase d’application de la règle de droit : à défaut de transparence du fait les objectifs de neutralisation de la violence et de rétablissement de la paix sociale ne pourront pas être véritablement atteints ”.[61]


2°) LA REPRESSION PENALE DE LA DISCRIMINATION

 

En matière de répression judiciaire de la discrimination, la pratique française met l'accent sur l'action pénale et rencontre d'importantes difficultés. Ces barrières tiennent à deux types de facteurs: d'une part, à la nature et aux exigences même du droit pénal en termes de respect de la présomption d'innocence et du degré de preuve à apporter pour emporter la condamnation du prévenu et, d'autre part, à la manière dont est gérée la politique pénale en matière de discrimination, du commissariat de police au tribunal.

 

A- LA DEFINITION ACTUELLE DU DELIT DE DISCRIMINATION

 

La discrimination constitue une violation au quotidien du droit fondamental à l'égalité. Sa sanction pénale tient une fonction symbolique pour l'ordre social et la victime. Cependant, le délit pénal quel qu'il soit, s'insère dans l'économie globale du droit pénal qui se doit, dans une société démocratique de respecter les droits de l'homme. Ce droit pénal doit donc répondre aux exigences de la CEDH qui requiert l’application concrète des principes de droits de la défense et de présomption d'innocence, tout en assurant le droit au recours effectif en cas de violation du droit fondamental à l’égalité, spécialement reconnu par la CEDH.

 

La condamnation pénale emporte non seulement sanction mais conséquences graves pour le statut civique du coupable: opprobre publique, privation de liberté, casier judiciaire, inéligibilité, restrictions à la liberté d'aller et venir, etc... Les règles du droit pénal ont donc pour fonction de dénoncer et sanctionner un comportement inacceptable mais également, de garantir la protection du citoyen contre une condamnation pénale arbitraire ou prononcée en présence d'une preuve insuffisante ou discutable.

 

Le régime juridique de la discrimination pénale est étroitement circonscrit par la définition du délit donnée par le Code pénal. Cette définition ne couvre pas la totalité des comportements discriminatoires. Elle ne vise que la discrimination intentionnelle que le législateur a choisi de qualifier de délit dans des circonstances précises. En outre, pour que la discrimination soit qualifiée de pénale, le parquet et/ou les victimes doivent être en mesure d'apporter une preuve d'intention caractérisée directement imputable à la personne poursuivie.

 

Le recours pénal de par ses exigences ne peut offrir un outil pour assurer le redressement de tous les comportements discriminatoires. Il pose le principe selon lequel la discrimination constitue un comportement délictueux, honni par la société. La qualification délictueuse d'un comportement intentionnel de discrimination a donc pour objet de rappeler que la limite a été franchie. La fonction pédagogique et symbolique du délit pénal s'inscrit dans la dénonciation publique de la gravité du geste posé. C’est une nécessité de rompre avec l’impunité de délinquants protégés par une banalisation collective.

 

En l’absence d’enjeu économique qui corresponde à la violence du rejet subit par la victime, le recours civil s'avère souvent inadéquat pour réprimer une discrimination quotidienne qui prend la forme d'un refus d'accès à l’emploi, au logement, aux loisirs, biens et services (commerces, boîtes de nuit, restaurants, services bancaires, etc...). De plus, dans les circonstances où la victime a été atteinte dans sa dignité, la seule compensation financière peut s'avérer insuffisante au besoin symbolique de dénonciation et de reconnaissance publique. La voie pénale assure alors à la victime la dénonciation d'un comportement socialement répréhensible, la punition d'un délinquant.

 

Alors que la qualification pénale de comportements ouvertement discriminatoires est le symbole de leur gravité et s'insurge contre la loi du silence, la démarche pénale est à la merci de l’isolement des victimes et du droit au silence du prévenu. En l'absence de témoin ou de preuve documentaire, aucune poursuite n'est possible. Dans une société où la discrimination est un fait quotidien banal, où la victime est souvent la moins à même de mobiliser le soutien nécessaire à la réalisation du recours (témoignages, recherches, consultations), cet isolement est indissociable du contexte du délit. Or, il n’est pas pris en compte par le régime juridique actuel qui n’a pas encore abordé la suffisance du dispositif pénal sous l’angle de l’efficacité de la répression pénale de la discrimination et de l’accès au recours de la victime garanti par l’article 6 de la CEDH.

 

Les enjeux de la réflexion sur la suffisance et l'efficacité du dispositif pénal dépendent donc de l'identification des comportements visés par le délit de discrimination et des difficultés que rencontrent la victime et /ou le parquet dans l’établissement de la preuve de la discrimination.

 

1- La définition stricte du délit de discrimination selon le Code pénal

 

-         L’objet du délit

 

L’infraction pénale de l’article 225-2 du Code pénal (ci-après CP) ne permet pas de réprimer tout acte discriminatoire. En définissant la discrimination à l’article 225-1 CP comme étant “  toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine (…) de leur appartenance ou leur non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race (…) ”, l’énumération de l’article 225-1 CP identifie les catégories protégées par la prohibition de discrimination. Subséquemment, l’article 225-2 CP énumère spécifiquement les cas où la discrimination sera sanctionnée par le Code pénal, c’est-à-dire :

 

“ (…) lorsqu’elle consiste :

 

1° A refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ;

2° A entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque ;

3° A refuser d’embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ;

4° A subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 ;

5° A subordonner une offre d’emploi à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1. ”

 

Or, il est important de souligner que tout le champ des comportements de la vie privée, ainsi que celui des discriminations commises par l’Etat (article 121-2 CP), n’est  pas visé par l’article 225-2 CP et n’est pas soumis à la sanction pénale.

 

Quant aux discriminations au niveau du déroulement de carrière, des conditions de travail, de la rémunération, de l’accès à la formation professionnelle, de l’affectation, qualification, classification, mutation etc…, elles sont exclues du champ de l’article 225-2 CP. La proposition de loi du Groupe Socialiste qui a succédé au projet de loi de modernisation sociale, entend intégrer ces circonstances de discrimination à la liste des discriminations visées par l’article L122-45 du Code du travail. Cependant, il est important de souligner que le Code du travail ne prévoit pas de sanction pénale en matière de discrimination raciste et que cette proposition de loi maintient un décalage entre les objets respectifs de l’article 225-2 CP et L122-45 du Code du travail : ces discriminations resteront oubliées au plan pénal. En matière de conditions de travail, seules les conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité de la personne prévues par le Code pénal à l’article 225-14, et l’obtention de biens et services non rétribués ou rétribués de manière manifestement insuffisante à l’article 225-13 CP, sont sanctionnées par le Code pénal.

 

Recommandation :

Þ    Amender l’article 225-2 CP afin de faire correspondre la liste des actes discriminatoires visés par l’article 225-2 CP aux actes discriminatoires énumérés à l’article L122-45 du Code du travail tel qu’il sera amendé par la Proposition de loi qui a succédé au projet de loi de modernisation sociale en incluant les discriminations au travail s’agissant du déroulement de carrière, des conditions de travail, de la rémunération, de l’accès à la formation professionnelle, de l’affectation, qualification, classification, mutation etc….

 

En outre, les discriminations non intentionnelles et systémiques ne sont pas couvertes par la répression pénale, l’article 121-1 CP précisant que “ Nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ” et l’article 121-3 CP, qu’“ Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ”.

 

L’exigence de la loi pénale impose la preuve de l’intention discriminatoire à l’égard de chaque personne poursuivie et ajoute de ce fait une charge supplémentaire à la preuve. En effet, pour obtenir une condamnation pénale le parquet et/ou la partie civile doivent prouver :

 

-         Le fait discriminatoire ;

-         L’intention discriminatoire de la personne poursuivie.

 

L’intention à établir est fondée sur une conception du racisme qui n’isole pas la notion de “ race ”. La discrimination sera sanctionnée dès lors que l’acte en cause est motivé par “ l’origine, l’appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée … ”. Le mot “ race ” figure parmi d’autres dans l’énumération des motifs du racisme. Ceci évite au juge d’avoir à entrer dans une démarche attribuant une légitimité au concept de “ race ” et de vérifier l’appartenance de la victime à une “ race ” : il lui suffit de constater que l’acte en cause correspond à l’une ou l’autre des catégories énumérées par la loi[62].

 

Il est important ici de souligner la formulation indirecte de la référence aux notions d’ “ ethnie ” et de “ race ” dans la définition du délit de discrimination de l’article 225-1 CP : “ […] toute distinction entre les personnes physiques à raison de […] leur appartenance ou non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race[…) ”. La loi dénonce non seulement la notion de “ race ” mais aussi l’attitude du discriminant qui y attache une valeur et qui assimile et réduit un individu à son origine, son “ ethnie ”, sa “ race ”.

 

Demeure que l’exigence de la preuve de l’intention est particulièrement lourde dans le contexte où :

 

-         L’auteur de la discrimination est difficilement identifiable;

 

-         Il s’agit d’imputer à une personne morale une intention discriminatoire suite aux agissements d’un employé dont le statut de dirigeant est discutable.

 

-         Il s’agit d’apprécier le fondement de la décision à l’origine de l’acte ou de la décision du prévenu.

 

 La preuve d’un motif discriminatoire parmi d’autres justifications est-elle suffisante pour constituer le délit ? En matière de discrimination syndicale, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a décidé le 14 juin 2000 que :

 

“ Mais attendu qu’en l’état de ces motifs, et alors que le délit prévu par l’article L412-2 du Code du travail peut être constitué même si la discrimination n’a pas été le motif exclusif des mesures prises (…) ”[63]

 

La solution selon laquelle la victime n’a pas à établir que le mobile de l’acte était exclusivement discriminatoire, a également été retenue par le Tribunal de Grande Instance de Grenoble le 20 mars 2000 dans une affaire de discrimination raciste à l’embauche où le tribunal a conclut à la preuve du mobile par les termes “ ce qui permet de confirmer que cette considération n’était pas étrangère à sa décision ”[64].

 

-         Qui est responsable ?

 

L’auteur de la discrimination intentionnelle est la personne responsable. Il peut s’agir d’un individu en interaction directe avec la victime ou d’un individu qui a initié une politique discriminatoire et de ses exécutants, en cas par exemple de refus d’accès dans une boîte de nuit ou de politique d’embauche discriminatoire. Cependant, l’auteur de cette politique peut être caché dans une structure hiérarchique (i.e. office HLM, administration, gestionnaire de bien, banque, ou toute entreprise). Il est dès lors difficilement identifiable et dans un tel contexte se pose la question de la recherche du responsable aux yeux de la loi pénale.

 

· La responsabilité de la personne morale

 

L’article 225-4 CP prévoit qu’une personne morale peut faire l’objet de poursuites conformément aux critères de responsabilité des personnes morales définis à l’article 121-2 al. 1 CP qui dispose qu’elles sont responsables pour les infractions commises pour leur compte “ par leurs organes ou représentants ”. La désignation d’une personne morale permet de dépasser la responsabilité de l’individu isolé et de mettre en cause une structure organisationnelle, économique ou sociale comme auteur de discrimination.

 

Aux termes de l’article 121-2 CP seuls les actes posés par un représentant (ayant statut de mandataire) ou les organes de direction sont visés par la sanction pénale.  La circulaire du 14 mai 1993 précise que “ la personne morale ne sera pas pénalement responsable des infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions par un employé, dès lors que celui-ci a agit de sa propre initiative ”. Les notions d’organe  et de “ représentant ” paraissent donc exclusives de celle de préposé.  Cependant, depuis la décision de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 1er décembre 1998, le délégataire a été reconnu comme représentant aux termes de l’article 121-2 al. 3 CP en matière de droit pénal du travail, et peut engager la responsabilité de la personne morale.

 

La faute de la personne morale est subordonnée “ à la réunion de tous les éléments constitutifs de l’infraction sur la tête de la personne physique, de l’organe ou du représentant ”[65]. La preuve documentée ou appuyée d’un témoignage, d’un geste posé dans le but de discriminer par un fondé de pouvoir, le représentant délégataire ou l’un des organes de la personne morale, doit être amenée.

 

Or, dans les faits, cette preuve du motif discriminatoire de l’acte de la personne morale est rarement disponible. L’autonomie ou l’initiative de ses préposés non dirigeants affranchit la personne morale de toute responsabilité pénale. Faute de preuve d’intervention qui lui soit directement attribuable, elle ne sera pas associée à la commission du délit.

 

-          La responsabilité du service public

 

Dans le chapitre intitulé “ Des atteintes à l’administration publique commises par des personnes exerçant une fonction publique ”, l’article 432-7 CP prévoit que la discrimination sera sanctionnée si une personne physique dépositaire de l’autorité publique ou chargée de mission de service publique “ refuse le bénéfice d’un droit accordé par la loi ” ou “ entrave l’exercice normal d’une activité économique ”. Par ailleurs, l’article 121-2 CP a été amendé afin de prévoire que “ les collectivités territoriales et leurs groupements soient responsables pénalement des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de conventions de délégation de service public. ”.

 

2- Des moyens possibles pour établir la preuve de la discrimination

 

La présomption d’innocence a pour effet de dispenser la personne suspecte de prouver son innocence. Elle impose la preuve de l’intention, de l’acte et du motif discriminatoire. L’intention seule sera insuffisante à conduire à une condamnation, et l’acte seul aussi.[66]De même, une décision discriminatoire sans auteur identifiable poursuivi échappera à la sanction pénale.

 

Compte tenu de l’élément intentionnel de la preuve requise, les acteurs ont tendance à évaluer la suffisance des preuves à charge en tenant compte essentiellement de preuves directes sous forme de témoignages, d’aveux ou de déclarations dont la preuve puisse être faite oralement ou par écrit.

 

Or, les témoins restent silencieux et sont réticents à donner leur concours à la victime de discrimination et la preuve documentaire est rarement disponible.

 

L’efficacité de la répression du délit pénal de discrimination dépend d’un véritable travail de construction de la preuve en termes d’accès aux témoins et aux éléments permettant de déduire le fait discriminatoire et l’intention de son auteur. Cette construction doit se faire en amont et résulter d’une réelle tentative de contourner les difficultés résultant de la non disponibilité de fait des preuves directes. Par ailleurs, l’inefficacité du recours pénal soulève la question de l’opportunité de revoir les exigences de la preuve à l’égard du délit de discrimination.

 

A. La construction de la preuve

 

-          La valorisation des témoignages

 

Comme l’accusé, la victime n’est pas entendue comme témoin, elle est entendue sans serment, ses déclarations n’étant pas perçues de façon autonome par les parquets comme ayant le poids suffisant pour que la plainte puisse donner lieu à poursuite. Ses déclarations ne suffisent pas à déclencher une enquête et ne font pas l’objet d’une prise en compte réelle.

 

La réquisition de témoins est possible lorsque le témoin est convoqué par la police judiciaire (article 62 du Code de procédure pénale), lorsqu’il est convoqué par le juge d’instruction (article 101 du Code de procédure pénale) et aux fins de l’audience (article 281 du Code de procédure pénale devant la Cour d’Assises, et l’article 439 du Code de procédure pénale devant le tribunal correctionnel). Le refus de témoigner constitue un délit en cas de déclaration publique de la connaissance de l’auteur du délit (article 434-12 CP), et dans les autres cas, est théoriquement sanctionné (article 109 du Code de procédure pénale devant le juge d’instruction et article 438 du Code de procédure pénale à l’audience). Ces articles sont rarement appliqués.

 

Les pressions sur les témoins sont sanctionnées en cas de subornation de témoin (article 434-15 CP) et d’intimidation pour que la victime ne porte pas plainte (article 434-5 CP).

 

Comme nous l’avons vu, aucune disposition générale ou spécifique du Code pénal ou du Code du travail ne met en place de dispositif qui protège les témoins ou le plaignant contre les représailles, sauf en cas de discrimination fondée sur le sexe à l’article L123-5 du Code du travail. [67]

 

Le dispositif pour valoriser la recherche des témoignages est présent en substance, mais l’obligation de témoigner n’est pas intégrée par les acteurs comme une obligation civique incontournable, et ce en raison notamment de l’absence de dispositif protégeant les témoins, leur réticence étant perçue comme légitime. Les dernières affaires révèlent que les témoignages de agents publics tels agents ANPE permettent à la victime d’avoir gain de cause. Il est important que les acteurs réaffirment et donnent corps à l’obligation de témoigner :

-         Des témoins assumant une fonction officielle:

Par l’exemple des agents du service public (ANPE, Missions locales).

-         Des intermédiaires tels agence d’intérim, agence immobilières et leurs préposés ;

-         Des collègues de travail, voisins et simples témoins.


Recommandations :

Þ    Permettre à la victime d’être entendue avec toutes conséquences de droit aux fins de la réception de la plainte du déclenchement de l’enquête et de l’instruction;

Þ    Prévoir dans le Code pénal et dans le Code du travail la protection formelle des témoins et plaignants contre les représailles ;

Þ    Ajouter à l’obligation de signalement des agents publics, l’obligation d’offrir leur concours au Parquet et de témoigner ;

Þ    Mettre en œuvre de manière accrue et systématique la réquisition de témoignage.

 

 

·        L’utilisation des outils d’accès à la preuve

 

L’article 56 du Code de procédure pénale prévoit que la preuve peut être acquise par des documents ou objets en possession de toute partie et l’article 427 du Code de procédure pénale, que les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve. Dans le système de l’intime conviction, le juge apprécie en toute liberté la valeur des preuves qui lui sont soumises. Il peut s’estimer convaincu par l’élément qu’il choisit, provenant des pièces, témoignages ou déclarations, et n’a pas à justifier son choix, à moins que la loi attribue une valeur probante spécifique à un élément déterminé[68].

 

Le travail de construction ne fait donc l’objet d’aucune contrainte et doit se faire au niveau de l’approche de l’enquête par le parquet, le magistrat instructeur ou à l’initiative de l’avocat de la partie civile. Voici des pistes d’initiatives d’enquête pouvant donner lieu à la construction d’un dossier de preuve :

 

-         La recherche de témoins et l’incitation des tiers ou intermédiaires entre la victime et le discriminant à témoigner (collègues, ANPE, agences d’intérim, agences immobilières) ;

 

-         L’ordonnance de mesures d’instruction propres à favoriser l’élaboration de preuves, notamment par indices desquels la preuve du délit matériel pourra être induite. Il s’agit d’obtenir accès à des éléments de preuve afin de procéder notamment à des analyses statistiques propres à révéler la discrimination. Quoique la force probante d’un tel procédé soit à priori incertaine, seule sa construction pourra la mettre à l’épreuve. En outre, elle est de nature à constituer un élément de preuve recevable, susceptible d’étoffer le dossier en cas de discrimination en matière d’accès au logement et d’embauche, notamment par la preuve quantitative quant à des comportements réitérés de refus de logement et de refus d’embauche de candidatures de personnes d’origine étrangère ;

 

-          L’individu et/ou un syndicat ou une association peuvent saisir directement le parquet d’une plainte. Il est important de souligner le rôle des syndicats et associations, intervenant en qualité de partie civile, dans la construction de la preuve. Leur connaissance des pratiques sur le terrain leur permet de concourir à l’enquête par la proposition de mesures d’instructions propres à faire entendre des témoins et à identifier la source d’éléments de preuve documentaire susceptibles d’étoffer le dossier ;

 

-          Tenir compte, comme dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de la Cour de cassation Chambre criminelle, Syndicat CFDT INTER CO c. Jean-Pierre Fort du 14 juin 2000 en matière de discrimination syndicale, de la preuve comparative quant au déroulement de carrière pour conclure à l’établissement d’une preuve du délit de discrimination ;

 

-          Utiliser les institutions représentatives du personnel dans l’entreprise (CHSCT et comité d’entreprise) qui ont accès à une documentation importante en matière de bilans sociaux et de santé.

 

-         Le référé-expertise par lequel un expert peut être désigné par le tribunal civil pour analyser les preuves et en tirer toutes conclusions, préconstituant une preuve qui peut ensuite être versée au dossier pénal ;

 

-         Le “ testing ” : Fort de la connaissance d’un scénario de comportement discriminatoire opéré par un délinquant, il s’agit pour les acteurs appuyant les victimes de créer les conditions de réalisation du délit tout en s’étant préparé à en recueillir la preuve. Par exemple, les parties civiles sont autorisées à se prévaloir d’enregistrements et peuvent mettre en place la proposition de candidats à l’embauche et au logement de manière à démontrer la discrimination, de tels procédés pouvant être utilisés dans la limite d’un enregistrement professionnel qui ne déborde pas en portant atteinte à la vie privée de la personne enregistrée[69] ;

 

-         Mettre en place des dispositif de documentation des processus de sélection en matière de logement et d’embauche.

 

Il est essentiel que la police judiciaire, le Parquet, les parties civiles (victimes, syndicats et associations) et le juge d’instruction investissent les outils du Code de procédure pénal de manière à procéder à une véritable enquête au-delà des éléments de preuve apportés au départ par la victime.

 

En outre, la mise en place par le législateur de dispositifs de documentation sur les procédures d’embauche, de location de logement etc… en créant par exemple l’obligation de conserver les messages d’offres, d’organiser la réception et le traitement des réponses aux candidatures, de tenir des fiches d’entretiens, aurait non seulement un effet favorable sur la transparence des processus de sélection, mais permettrait la préconstitution de preuves au bénéfice des parties.

 

Recommandations :

Ø      Conduire les parquets à évaluer plus justement le faisceau d’indices en matière de preuve de discrimination ;

Ø      Mettre en place des dispositifs de documentation concernant les procédures d’évaluation, de sélection des candidats à l’embauche, au logement et au crédit ;


B. La question de la charge de la preuve

 

Le geste discriminatoire qui correspond à la définition du Code pénal mais ne laisse pas de traces suffisantes pour qu’il soit sanctionné, doit-il pour autant rester impuni ?

 

L’article 6.1 de la CEDH reconnaît que :

 

“ Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délais raisonnable par un tribunal compétent et impartial. ”

 

La notion de “ toute personne ” vise le justiciable, et la garantie de l’Etat doit offrir l’effectivité d’un recours équitable. Ceci requiert que chacune des parties au procès puisse soutenir sa cause dans des conditions qui ne la désavantagent pas substantiellement par rapport à la partie adverse[70], offre l’assurance que la victime soit en mesure de voir la violation de ses droits sanctionnée.

 

Quoique les difficultés de la victime à apporter la preuve de la discrimination découlent en partie d’une faible mobilisation des parquets et d’un manque d’initiative en matière de recherche de preuve, l’impunité dont fait l’objet la discrimination dépend également de la difficulté à prouver que l’acte posé par le prévenu ait un mobile discriminatoire. Ceci soulève la question de l’opportunité d’une intervention du législateur afin de réaménager la charge de la preuve de la discrimination pour compenser l’inaccès de la victime à la preuve.

 

Est-il possible de créer un cadre relativement aux conditions de  preuve du délit qui assure l’accès de la victime à des conditions de recours équitables et à la preuve ? A cette fin, le dispositif doit reconnaître que la discrimination fermente dans le silence et est protégée par le droit au silence du prévenu. Plusieurs outils et mécanismes juridiques répandus sont disponibles pour opérer les aménagements nécessaires :

 

-         Faire de la discrimination un délit à l’égard duquel l’exigence de la preuve d’intention de la personne poursuivie est allégée, où l’établissement du mobile discriminatoire de l’acte se déduit de la preuve de l’acte posé volontairement, ce qui pourrait faciliter notamment la condamnation des personnes morales ; ou,

 

-         Permettre une preuve par présomption qui n’exigerait de la victime qu’une preuve d’indices déterminés par la loi et qui permettrait une fois cette preuve amenée d’exiger que la personne poursuivie ne puisse se réfugier dans le silence et l’attentisme face à la preuve de la demande, mais soit plutôt contrainte de répondre et de se justifier ;

 

-         Prévoir, en matière d’infractions à caractère raciste, que les juridictions pénales puissent tirer des conséquences précises du silence du prévenu.

 

Ces procédés sont connus du droit pénal français. L’allégement de la charge de la preuve d’intention existe par exemple en droit pénal du travail pour le délit d’entrave et le renversement de la charge de la preuve existe en matière de délit de presse, de contrefaçon et de délit de douanes.

 

Or, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme a reconnu l’opportunité de certaines présomptions:

 

“ Tout système juridique connaît des présomptions de fait ou de droit, la Convention n’y met pas obstacle en principe, mais en matière pénale elle oblige les Etats contractants à ne pas dépasser les limites raisonnables prenant en compte la gravité de l’enjeu et préservent les droits de la défense. ”[71]

 

La Cour de cassation a repris cette formule en reconnaissant que “ … l’article 6-2 de la Convention … ne met pas obstacle aux présomptions de faits ou de droit instituées en matière pénale dès lors qu’elles tiennent compte de la gravité de l’enjeu et “laissent entiers les droits de la défense ”.[72]

 

L’étude de cette question exige d’identifier l’ensemble des procédés utilisés par la loi pénale pour alléger la preuve du ministère public, d’analyser l’historique des présomptions qui ont été reconnues par la jurisprudence ou introduites au Code pénal pour faciliter la preuve d’un délit spécifique, et de se pencher, à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui veille à la mise en œuvre de la CEDH, sur l’opportunité de formuler des exceptions à la présomption d’innocence en matière de délits sanctionnant la violation des droits fondamentaux.

 

Recommandation :

Þ    Approfondir le travail sur les procédés d’allégement de la preuve en matière de délit pénal de discrimination.

 

3 – La complémentarité entre l’action civile et  l’action pénale

 

La victime détient l’option d’engager l’action civile devant le tribunal civil ou le tribunal pénal (article 3 du Code de procédure pénale). Si elle agit devant le tribunal pénal, le dommage doit puiser sa source dans l’infraction pénale (et non dans une qualification civile de la discrimination). Si elle exerce une action civile devant le juge civil, l’engagement du recours pénal sur la base des mêmes éléments de fait suspendra l’action civile (article 4 du Code de procédure pénale). Et la constitution de partie civile devant le juge pénal implique un renoncement de cette même personne à l’action devant la juridiction civile (article 5 du Code de procédure pénale). Ainsi, dans les faits il faut choisir le forum du débat judiciaire.

 

En matière de recours civil pour discrimination, la jurisprudence récente de la Cour de cassation et la proposition de loi qui fait suite au projet de loi de modernisation sociale construisent des outils, tels le transfert de la charge de la preuve, qui faciliteront la preuve pour la victime. Le régime de preuve civile pourrait permettre à une victime qui n’aurait pas les éléments pour établir la preuve de l’intention pénale, de remplir les exigences de la preuve civile, c’est-à-dire d’amener des éléments de fait permettant le déplacement de la charge de la preuve.

 

Cependant, voie civile et voie pénale ne s’excluent pas totalement et peuvent parfois être combinées. L’instruction pénale peut alimenter le recours civil ou, inversement, l’utilisation du référé civil pour sauvegarder des preuves peut faciliter les poursuites pénales. Ainsi, dans l’affaire Peugeot, un référé prud’homal a précédé l’engagement de poursuites pénales pour discrimination[73].

 

 

Recommandations :

Þ    Permettre au juge pénal de sanctionner le dommage extra-pénal en matière de discrimination raciste en cas de relaxe (cf. art. 470-1 du Code de procédure pénale).

 

 

B- CONSTRUIRE UNE POLITIQUE PENALE DE LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS

 

1 - Les sources du Parquet

 

A. La police judiciaire

 

La principale source d'information du parquet est la police judiciaire. Or, les commissariats refusaient parfois de recevoir les plaintes pour discrimination ou de se déplacer suie à un signalement. La loi no 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence, réagit à cette réalité en ajoutant un article 15-3 dans le Code de procédure pénale, faisant obligation à la police judiciaire “ de recevoir les plaintes déposées par les victimes d’infraction à la loi pénale et de les transmettre, le cas échéant, au service ou à l’unité de police judiciaire territorialement compétent ”. Cette réforme devrait corriger l’obstacle au recours créé par le fait que la plupart des plaintes déposées par les victimes au commissariat étaient prises en main courantes, ce qui signifie qu'elles n’étaient jamais transmises au Ministère Public. A Paris, lorsque les mains courantes en matière d'infraction racistes ont été bannies, une augmentation substantielle du nombre de plaintes de discrimination a été observée.

 

B. L’officier Public

 

L'article 40 al.2 du Code de procédure pénale prévoit que tout officier public qui a connaissance d'un délit dans l'exécution de ses fonctions est tenu d'en donner le signalement au Procureur de la République. Or, la mise en oeuvre accrue de cette disposition constitue la principale source de plaintes et de condamnations, notamment par l'intermédiaire des témoignages des conseillers ANPE ou de l’inspection du travail. Il est important de souligner que les jugements du Tribunal de Grande Instance de Grenoble du 20 mars 2000 et du Tribunal de Grande Instance de Châteauroux du 14 juin 2000, condamnant des employeurs en matière de discrimination à l’embauche, ont été rendus possibles suite au concours et au témoignage de conseillers de l’ANPE.

 

-         L’inspecteur du travail

 

L’inspection du travail est une autorité administrative chargée de veiller à l’application de la législation du travail et des règles relatives à la discrimination dans une circonscription donnée, sous l’autorité du directeur départemental du travail et de l’emploi. Or, elle n’a pas les ressources pour veiller à l’ensemble des missions qui lui sont confiées, le nombre d’inspecteur étant limité (1600 pour l’ensemble du territoire).[74] Elle est très peu sollicitée en matière de discrimination fondée sur le sexe ou de discrimination raciale[75] et de l’avis du Conseil économique et social de 1996, l’inspection du travail ne visitait que 14% des établissements qui lui étaient assujettis en 1994.

 

L’article L611-1 du Code du travail prévoit que les inspecteurs du travail peuvent constater les infractions de discrimination au travail sanctionnées par l’article 225-2 al. 3 CP. Ils disposent d’un certain nombre de prérogatives de police judiciaire : droit de visite inopinée dans les établissements (L611-8 du Code du travail),  d’un droit de communication des pièces (L611-9 du Code du travail) et d’un droit d’enquête (L611-8 du Code du travail). Ils peuvent auditionner sur place les salariés de leur choix mais ne peuvent les contraindre à témoigner. Ils peuvent en outre exiger de se faire présenter les registres, livres et documents rendus obligatoires par le Code du travail ou les Lois du travail, mais ne peuvent exiger la présentation d’autres éléments ou documents internes tels les documents qui reflètent la politique de gestion des salaires, les fiches d’appréciation des salariés etc…[76].

 

L’inspecteur du travail peut soit dresser un procès verbal d’infraction conformément à l’article L611-1 du Code du travail ou un rapport conformément à l’article 40 al.2 du Code de procédure pénale constituant un signalement au Ministère public. Quoique l’article L611-1 du Code du travail ne restreigne pas son rôle au déclenchement des poursuites, sa compétence dans les faits est limitée à la recherche d’infractions mais qui sont classées à 75% par le parquet. En outre, le quart de la totalité des affaires amenées au tribunal donnent lieu à condamnation, dont très peu d’affaires concernant la discrimination.[77]

 

Les inspecteur du travail considèrent que leur pouvoir de verbaliser est inopérant vu l’extrême exigence des juges quant à la preuve de l’intention pénale en matière de discrimination[78].

 

 L’inspecteur du travail peut offrir des conseils au salarié et intervenir auprès de l’employeur pour lui faire part d’une plainte ou exiger la modification d’une clause discriminatoire du règlement intérieur, mais il ne peut transmettre son dossier d’enquête au salarié afin qu’il initie un recours civil, et il doit s’abstenir dans l’éventualité d’un recours du salarié.[79]

 

D. Les particuliers, les associations et les syndicats

 

L’individu ou, en matière pénale, une association de lutte contre le racisme (articles 2-1 du Code de procédure pénale) peut saisir directement le parquet d’une plainte, ce qui ne dispense pas ce dernier de son obligation de rechercher si l’infraction alléguée a ou non été commise. Sa liberté d’agir et de juger l’opportunité des poursuites, énoncée à l’article 40 al. 1 du Code de procédure pénale, ne le dispense pas de sa mission de recherche de preuve énoncée à l’article 41 al. 1 du Code de procédure pénale.

 

En matière pénale, les syndicats ne peuvent se constituer partie civile au delà des cadres posés par l’article L411-11 du Code du travail qui restreint leur capacité d’intervention “ aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent ”. Leur capacité d’intervention est donc circonscrite aux discriminations dans l’emploi ou le travail.

 

Recommandations :

Þ    Réaffirmer l’obligation de signalement des discriminations des officiers publics ;

Þ    Elargir les pouvoirs d’enquête de l’inspecteur du travail, notamment quant à l’objet et à la nature des documents auxquels il peut exiger d’avoir accès ;

Þ    Donner à la victime et aux délégués du personnel, l’accès au dossier de l’inspection du travail aux fins de l’élaboration du dossier civil et pénal.

 

2-L'opportunité des poursuites

 

L'article 40 al.1 du Code de procédure pénale énonce le principe selon lequel le parquet peut décider de poursuivre ou non. Il ne s'agit pas d’un pouvoir discrétionnaire qui offre au parquet le loisir de poursuivre ou non. Cette latitude s'inscrit dans le contexte où d'autres solutions s'offrent à lui (voir à l’article 41-1 et 41-2 du Code de procédure pénale, le rappel à la loi ou la médiation) et dans un souci de maintenir la crédibilité du système et le rôle pédagogique de l'action pénale.

 

Il apparaît important de souligner les possibilités offertes par la plainte avec constitution de partie civile prévue par l’article 85 du Code de procédure pénale. Ce mode de saisine de la juridiction pénale requiert un dépôt de consignation de la partie civile, mais il permet l’ouverture de l’instruction et empêche le classement sans suite du Parquet

 

Quant à la citation directe, elle implique le déploiement du recours sans le concours du parquet et de l’instruction. Elle est donc très risquée car elle n’autorise qu’un recours sans moyens d’accès à la preuve et suppose que la victime soit déjà en possession de la totalité de la preuve requise pour l’obtention de la condamnation pénale. Quoiqu’elle puisse apparaître comme une solution pour les causes de principe, elle ne saurait être vue comme une réponse à la victime isolée et à la masse des incidents racistes.

 

Le dépôt requis, tout comme en cas de constitution de partie civile, varie entre 1000F et 15000F par plaignant et sa détermination est discrétionnaire. Or, ce dépôt est perçu comme un moyen de limiter l’accès au recours.

 

Lorsque le parquet étudie les plaintes, le ratio des poursuites en matière de discrimination est le même que pour les autres infractions pénales. Seul leur nombre est moindre en raison des réticences des acteurs à porter plainte et des effets du manque de reconnaissance du délit comme délit à part entière par les commissariat de police et plusieurs parquets. Sur dix affaires par an à Paris, le parquet initie trois poursuites. Or, dans plusieurs départements, les commissariats ne transmettent pas les plaintes,  le parquet classe sans suite, sans motiver sa décision et sans même en informer le plaignant, qui de ce fait n’est pas en mesure de contester cette décision ou de procéder par voie de plainte avec constitution de partie civile ou de citation directe pour poursuivre l’affaire. Ce classement se fait-il après que toutes les mesures utiles d’enquête aient été épuisées ? Il semblerait que les multiples circulaires publiées par le ministre de la justice aient été à ce jour peu prises en considération[80].

 

Le manque de transparence quant au suivi opéré par les commissariats de police et les parquets, notamment en ce qui concerne les critères qui interviennent dans la décision de mener une enquête ou de poursuivre ou non, alimente une incapacité d’évaluer les potentialités offertes par le dispositif pénal existant.

 

Recommandations :

Þ    Prévoir l’élaboration de critères clairs quant à la fixation du montant du dépôt en cas de citation directe et de constitution de parties civiles en matière d’infractions racistes;

Þ    Prévoir une obligation d’information de la victime relativement à ses droits et au déroulement de la procédure, et ce dès le dépôt de la plainte ;

Þ    Affirmer l’obligation des parquets de traiter le délit de discrimination comme un délit à part entière en soulignant l’obligation de procéder à une enquête avant de classer la plainte ;

Þ    Prévoir au sein de chaque parquet la mise en place d’une section en charge des questions de racisme et de discrimination ;

Þ    Réitérer la nécessité de réaliser effectivement la concertation entre les parquets et les spécialistes, associations de lutte contre le racisme et représentants des barreaux.

 

3- Les sanctions

 

Les sanctions en matière de délit de discrimination sont très faibles. Par exemple, les boîtes de nuit ciblées par SOS Racisme, préféraient, jusqu’à l’intervention du gouvernement, payer l’amende et récidiver que changer leurs pratiques. Ceci souligne l’intérêt d’être en mesure de sanctionner pénalement la personne morale et de faire peser sur elle une pression plus significative que la simple amende.

 

Les sanctions récentes tendent à devenir plus significatives. Les juges condamnent dans certains cas graves de discrimination à l’embauche ou de refus de logement, où un enjeux matériel mesurable est en cause, à la prison avec sursis (en général 2 à 3 mois), à des amendes de 10 000F à 20 000F et à des dommages intérêts. Cependant, en deçà des montants et peines allouées dans ces quelques affaires et surtout des dommages-intérêts consentis aux parties civiles, l’on peut affirmer que la sanction est intégrée aux frais d’opération de l’entreprise et a souvent très peu d’impact.

 

En matière de discrimination, le Code pénal prévoit à l’ article 225-19 CP la possibilité de condamner les individus et, à l’article 225-4 CP faisant référence à l’article 131-39 CP, la possibilité de condamner les personnes morales, à des peines complémentaires pouvant aller de la fermeture temporaire ou définitive d’un établissement qui appartienne à la personne condamnée, à l’interdiction d’exercer, l’exclusion des marchés publics et la déchéance des droits civiques pour les individus. Ces peines qui seraient susceptibles d’avoir un impact sur les pratiques, ne sont pas requises par les parquets et ordonnées par les magistrats.


Recommandations :

Þ    Inciter les parquets à requérir contre les délinquants des peines plus lourdes en ayant recours notamment aux possibilités dissuasives offertes par les peines complémentaires prévues au Code pénal ;

Þ    Prévoir à l’article 432-7 CP des peines complémentaires lorsque l’auteur du délit est une personne dépositaire de l’autorité publique, telles les peines accessoires relatives au droit de vote, à l’éligibilité et au droit d’exercer une fonction juridictionnelle, visées par l’article 131-26 par. 1, 2 et 3 CP.

 

 

Le délit pénal en matière de discrimination raciale et sexiste, est actuellement une arme de répression peu efficace. La preuve de l’inégalité de traitement pourrait être accessible, mais l’exigence des magistrats relativement à la preuve de l’intention discriminatoire et la rareté de la disponibilité des preuves à cet égard, ont pour conséquence de faire dépendre la preuve du délit de la disponibilité d’un aveu écrit ou verbal. Les délits de discrimination raciale et sexiste sont donc de fait réduits à ne réprimer que la discrimination revendiquée par son auteur.


Conclusion

 

 

Parvenu au terme – provisoire - de ces travaux, le groupe de travail confirme que le droit peut et doit être un outil dans la lutte contre les discriminations. Ce recours au droit est évidemment complémentaire, et en aucun cas concurrent à la mobilisation de l’Etat, des associations et des organisations syndicales et patronales. Au contraire, une des conditions de son effectivité réside dans son appropriation par l’ensemble des acteurs.

 

Mais pour être une “ menace crédible ” dans le dispositif d’ensemble de lutte contre les discriminations, le droit doit être adapté aux buts poursuivis, facile d’accès et de mise en oeuvre. Force est de constater que les outils juridiques en vigueur dans notre pays ne répondent qu’imparfaitement à ces exigences.

 

En effet, la centralité de l’action pénale, pour légitime qu’elle soit s’agissant de faits proprement délictueux, éclipse les autres voies de recours possibles. Surtout, elle est difficile à mettre en œuvre, principalement du fait de la charge de la preuve. Le faible nombre de procès pénaux atteste de ces difficultés. La construction d’une politique pénale en la matière, telle que préconisée par le groupe de travail, accompagnée des aménagements envisagés en matière de construction de la preuve, sont susceptibles de rendre plus aisé le recours à la voie pénale.

 

Mais de façon complémentaire, il s’agit de faire émerger les actions civiles comme une voie de recours pertinente. En prenant appui sur les concepts issus du droit communautaire –aménagement de la charge de la preuve, discrimination indirecte -, le recours civil est susceptible d’offrir des modes de sanction et de réparation des discriminations plus faciles à mettre en œuvre. A cet égard, la proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations discutée le 12 octobre 2000 par l’Assemblée Nationale, constitue une première avancée significative en matière de droit du travail.

 

Au total, une action civile modernisée, qui facilite l’établissement de la preuve, constituera un puissant levier du recours au droit dans la lutte contre les discriminations, sans pour autant concurrencer la voie pénale.

 

D’autres outils sont encore à rechercher. Certains sont apparus lors des travaux, telle l’action de groupe ou la nécessité d’une instance qui permette la constitution d’un savoir et d’un savoir-faire en matière juridique. Le groupe de travail est d’ailleurs disposé à approfondir sa réflexion pour préciser les contours et les missions de cette instance destinée à aider les acteurs à s’approprier, face à toutes les formes de discriminations, les outils, nouveaux ou à redécouvrir, offerts par le droit.


Liste des recommandations

 

Concernant l’amélioration de la procédure civile, et notamment la  proposition de loi du groupe socialiste relative à la discrimination :

 

-         Ajouter à l’article L122-45 du Code du travail une disposition pour protéger les témoins et plaignants contre les représailles, au même titre que dans le contexte des protections offertes en matière de harcèlement sexuel et de discrimination fondée sur le sexe ;

 

-         En matière de recours civil en discrimination, permettre aux associations antiracistes d’ester en justice devant les prud’hommes et/ou d’intervenir dans la procédure devant les tribunaux de droit commun au même titre que les organisations syndicales ;

 

-         Amender l’article 225-2 CP afin de faire correspondre la liste des actes discriminatoires visés par l’article 225-2 CP aux actes discriminatoires énumérés à l’article L122-45 du Code du travail tel qu’il sera amendé par la Proposition de loi qui a succédé au projet de loi de modernisation sociale en incluant les discriminations au travail s’agissant du déroulement de carrière, des conditions de travail, de la rémunération, de l’accès à la formation professionnelle, de l’affectation, qualification, classification, mutation etc… ;

 

-         Prévoir au Code pénal la protection formelle des témoins et plaignants en matières civile et pénale contre les représailles ;

 

-         Elargir les pouvoirs d’enquête de l’inspecteur du travail, notamment quant à l’objet et à la nature des documents auxquels il peut exiger d’avoir accès ;

 

-         Donner à la victime et aux délégués du personnel accès au dossier de l’inspection du travail aux fins de l’élaboration du dossier civil et pénal ;

 

7.    Protéger le droit d’agir en justice contre les représailles de la personne poursuivie.

 

Matière civile

 

-         Affirmer le droit aux mesures d’instruction en matière de recours civil en discrimination ;

 

-         Reconnaître un droit de transmission à la victime de discrimination relativement à tout document de l’entreprise pertinent au litige tel que formulé dans les actes de procédures ;

 

-         Mettre en place des dispositifs de documentation concernant les procédures d’évaluation et de sélection des candidats à l’embauche, au logement et au crédit.

 

Matière pénale

 

-         Permettre à la victime d’être entendue avec toutes conséquences de droit aux fins de la réception de la plainte, du déclenchement de l’enquête et de l’instruction ;

 

-         Ajouter à l’obligation de signalement des agents publics, l’obligation d’offrir leur concours au parquet et de témoigner ;

 

-         Mettre en œuvre de manière accrue et systématique la réquisition de témoignage;

 

-         Affirmer l’obligation du parquet et des officiers de police judiciaire d’effectuer de véritables enquêtes ;

 

-         Conduire les parquets à évaluer plus justement le faisceau d’indices en matière de preuve de discrimination ;

 

-         Approfondir le travail sur les procédés d’allégement de la preuve en matière de délit pénal de discrimination ;

 

-         Permettre au juge pénal de sanctionner le dommage extra-pénal en matière de discrimination en cas de relaxe (cf. art. 470-1 du Code de procédure pénale) ;

 

-         Réaffirmer l’obligation de signalement des discriminations des officiers publics ;

 

-         Prévoir l’élaboration de critères clairs quant à la fixation du montant du dépôt en cas de citation directe et de constitution de parties civiles en matière d’infractions racistes ;

 

-         Prévoir une obligation d’information de la victime relativement à ses droits et au déroulement de la procédure, et ce dès le dépôt de la plainte ;

 

-         Affirmer l’obligation des parquets de traiter le délit de discrimination comme un délit à part entière en soulignant l’obligation de procéder à une enquête avant de classer la plainte;

 

-         Prévoir au sein de chaque parquet la mise en place d’une section en charge des questions de racisme et de discrimination ;

 

-         Réitérer la nécessité de réaliser effectivement la concertation entre les parquets et les spécialistes, associations de lutte contre le racisme et représentants des barreaux ;

 

-         Inciter les parquets à de requérir contre les délinquants des peines plus lourdes en ayant recours notamment aux possibilités dissuasives offertes par les peines complémentaires prévues au Code pénal ;

 

-         Prévoir à l’article 432-7 CP des peines complémentaires lorsque l’auteur du délit est une personne dépositaire de l’autorité publique, telles les peines accessoires relatives au droit de vote, à l’éligibilité et au droit d’exercer une fonction juridictionnelle, visées par l’article 131-26 par. 1, 2 et 3 CP ;

 

Enfin, afin de faciliter la construction et l’appropriation des outils juridiques destinés à la lutte contre les discriminations :

 

-         A cet effet, mettre en place une instance spécifique.

 


Annexes

 

 

 

Annexe 1 Note de l’Association Villermé relative au rôle des Inspecteurs du travail dans les luttes contre les discriminations

 

 

 

 

 

 

 

 

Madame LANQUETIN Marie-Thérèse

G E D

 

 

 

 

Madame,

 

 

 

A la suite de mon intervention du 16 juin sur les discriminations au travail, vous avez souhaité que je transcrive par écrit mes propositions d’amélioration du dispositif juridique de lutte contre ces phénomènes, ce que je fait bien volontiers.

 

 

1 – LES CONSTATS –

 

Les réclamations que nous recevons dans le domaine de la discrimination syndicale sont nombreuses. En comparaison, celles relatives aux discriminations sexistes ou raciales sont plutôt rares.

 

Au vu des informations et témoignages recueillis, ainsi que des situations observées, les premières traduisent une réalité où la discrimination syndicale est très répandue, voire banalisée dans les entreprises. Malgré certains discours, le syndicalisme d’entreprise demeure, globalement dans la culture patronale, un phénomène étranger, potentiellement nuisible, qu’au mieux on supporte, que dans la plupart des cas on tente de circonscrire et qu’au pire on cherche à éradiquer. Cette situation est non seulement grave pour les libertés, mais elle génère aussi, chez ceux qui assument leurs convictions, un sentiment profond d’injustice, voire de souffrance, car les procédés utilisés visent la personnalité avec un impact extra professionnel qui touche notamment la famille. Elle est, sans aucun doute, une des causes essentielles de la faiblesse syndicale dans notre pays.

 

La rareté des deuxièmes peut s’expliquer par le fait que les discriminations directes y sont davantage liées à des comportements individuels plus qu’à un mode de gestion de l’entreprise. Cependant le phénomène de la discrimination indirecte (emploi systématique ou majoritaire de femmes ou d’immigrés dans les basses qualifications) y est certainement plus répandu que le nombre de réclamations reçues ne laisse penser, en raison d’un consensus social qui intègre les victimes elles-mêmes.

 

L’expérience que nous tirons du traitement de la discrimination syndicale est néanmoins généralisable à l’ensemble des discriminations au plan des procédures et de la technique juridiques. Son trait caractéristique réside dans l’inefficacité des incriminations pénales dans ce domaine et en conséquence dans l’impuissance de l’Inspection du travail à y porter remède.

 

 

2 – L’INEFFICACITE DES INCRIMINATIONS PENALES ET L’IMPUISSANCE DE L’INSPECTION DU TRAVAIL –

 

L’Inspection du Travail dispose depuis 1973 du pouvoir de relever le délit de discrimination syndicale par Procès-Verbal. Ce pouvoir s’est ensuite étendu aux autres discriminations dans les décennies 80 et 90.

 

Or force est de constater que ce pouvoir s’est révélé presque complètement inopérant pour conduire à la répression que méritaient les situations rencontrées ; à tel point que nombre de collègues ont même renoncé à l’utiliser. D’une manière quasi systématique en effet, les procès-verbaux de l’Inspection du Travail viennent butter sur l’obstacle de la preuve de l’intention discriminante que les juges du pénal exigent dans cette matière avec une rigueur extrême et inégalée en droit pénal du travail.

 

Les délits de discrimination sont fondés sur deux éléments qui doivent être caractérisés pour envisager l’action pénale. Le premier, l’élément matériel, est constitué par la différence de traitement ; il ne pose guère de difficulté à l’Inspection du Travail qui dispose de pouvoirs d’investigation étendus dans le domaine des salaires et des conditions de travail. Le second, l’élément intentionnel, est lui, constitué par la volonté de pratiquer cette différence de traitement en raison de l’appartenance à un syndicat, un sexe, une race etc… C’est ce deuxième élément et l’interprétation qu’en donne la justice qui font problème et ruinent l’efficacité du dispositif juridique mis en place.

 

La preuve idéale de cette intention discriminatoire serait l’aveu, mais on imagine mal un employeur reconnaître spontanément  qu’il a pratiqué une différence de traitement en raison de l’appartenance syndicale du salarié. Cette preuve pourrait encore être établie par des témoignages publics sont exceptionnels par crainte des mesures de rétorsion que facilite le lien de subordination. L’Inspection en reçoit pourtant de nombreux, mais ils sont presque toujours assortis d’une exigence de confidentialité (à laquelle elle est tenue par une convention internationale), ce qui les rend inexploitables au plan de la justice pénale.

 

En dehors de ce mode de preuve, seule la technique pénale du faisceau d’indices et de présomptions, utilisé par la police judiciaire, permet d’apporter la preuve de cette intention. Or, la quasi-totalité des tentatives de l’Inspection du Travail d’utiliser cette technique s’est soldée par un échec. Les coïncidences troublantes et répétées, les paroles de dénigrement de l’action syndicale, les situations défavorables uniques, l’approche statistique caractérisée, les faux motifs de justification d’une situation discriminante etc, se sont révélés inopérants même si ces éléments se trouvent tous associés et qu’il n’existe aucune autre raison plausible que la volonté de porter atteinte à la liberté syndicale pour justifier une différence de traitement. Il semble que, dans ce domaine, les juges aient renoncé aux prérogatives de l’intime conviction pour exiger une preuve formelle qui, dans la plupart des cas est impossible à rapporter et, qui dans les cas ou elle le serait exigerait les pouvoirs d’un juge d’instruction. Or compte tenu de l’état des moyens de la justice, on imagine mal le recours systématique au juge d’instruction dans ce type d’affaire.

 

 

3 – TENTAVIVE D’EXPLICATION –

 

Cette attitude de la justice pénale est à bien des égards incompréhensible. Elle a même généré des conflits entre agents de l’Inspection du Travail et magistrats, les premiers l’expliquant par une démarche idéologique, les second réagissant en traitant l’Inspection du Travail “ d’antichambre des syndicats ”.

 

Au-delà des anathèmes, les tentatives de dialogue n’ont guère été plus fructueuses, car l’argument de la spécificité du pénal asséné en dernier ressort, n’explique rien en soi.

 

Il faut donc aller au-delà et tenter d’analyser le pourquoi des exigences de la justice pénale pour entrer en répression dans ce domaine. Deux arguments qui s’entretiennent mutuellement, l’un de technique pénale, l’autre de criminologie, me semblent déterminants pour expliquer cette situation et tenter de la faire avancer.

 

Le premier argument concerne la nature de l’intention nécessaire pour établir le délit de discrimination. Dans les infractions volontaires dont font partie le délit de discrimination, l’intention peut présenter trois degrés : le dol lato sensu, le dol général et le dol spécial. Si l’on met à part le dol spécial propre à certaines infractions particulières, le dol lato sensu est en quelque sorte une volonté implicite qui se déduit de la réalisation de l’acte incriminé tandis que le dol général est une volonté implicite qui se déduit de la réalisation de l’acte incriminé tandis que le dol général est une volonté d’accomplir cet acte. Le dol lato sensu est très simple à établir pour la partie poursuivante, puisqu’il résulte de l’acte lui-même. Ainsi par exemple dans les délits à la protection imposée par la loi. Le dol général exige par contre que l’on apporte la preuve de la volonté délictueuse. Ainsi par exemple le fait de tuer quelqu’un n’est pas forcément un meurtre, pour qu’il y ait meurtre la partie poursuivante devra prouver la volonté de tuer. Or le délit de discrimination est fondé sur un dol général ; la différence de traitement caractérisée ne permet donc pas d’apporter la preuve d’une intention délictueuse implicite, il faut en plus apporter la preuve de la volonté de nuire à l’appartenance syndicale, au sexe ou à la race. Ceci constitue la première difficulté de la démonstration du délit de discrimination. Elle n’explique pas tout, puisqu’en droit pénal la preuve peut être apportée par tous moyens et que le juge peut décider en fonction de son intime conviction.

 

Il faut donc recourir à l’argument de la criminologie. Celle-ci oppose traditionnellement deux types de délits : les délits aux valeurs fondamentales et les délits de discipline sociale. Les premiers visent à protéger certaines valeurs sociales jugées essentielles à l’existence même de la société : la vie, l’intégrité physique, le droit de propriété, certaines libertés et droits de la personne. Les seconds visent à imposer le  respect de certaines règles jugées indispensables au bon fonctionnement de la société. Les premiers constituent l’essence du droit pénal, on les appelait initialement les “ délits naturels ”. Ils sont entourés de garanties formelles importantes et pour ceux d’entre eux qui sont des délits volontaires, l’intention délictueuse est représentée par le dol général ou le dol spécial. Les seconds considérés comme moins importants, sont aussi entourés de moins de garanties. Ce sont souvent d’anciennes contraventions correctionnalisées par souci d’accroître la pression sociale nécessaire pour obtenir le respect des  prescriptions qu’elles répriment et, ce sont des délits à dol lato sensu. On peut dire des délits de discrimination, en particulier du délit de discrimination syndicale qu’ils ont une nature hybride. D’une part en effet l’évolution des mœurs fait de la liberté syndicale qu’il faut protéger d’autre part le respect des droits syndicaux est considéré comme une contrainte nécessaire à l’équilibre social dans l’entreprise. Cependant au plan de la technique pénale ce délit est construit comme un délit aux valeurs fondamentales, puisqu’il exige la preuve d’un dol général. Au plan de sa mise en œuvre par la justice il cumule les inconvénients des deux types de délits, au titre du délit aux valeurs fondamentales, il doit supporter la rigueur des garanties formelles, au titre de discipline sociale, il est considéré comme une infraction de moindre importance par les magistrats. A cela il faut encore ajouter que parmi les délits aux valeurs fondamentales, la rigueur des garanties formelles est d’autant plus grande que la valeur protégée peut s’opposer à une autre valeur fondamentale. Ainsi en va t-il du délit de diffamation ou le droit de la personne du salaire s’oppose à la liberté d’entreprendre. En outre force est de constater qu’il existe entre les deux libertés un déséquilibre politique au profit de la liberté d ‘entreprendre, compte tenu de l’exaltation sociale dont elle a fait l’objet ces deux dernières décennies.

 

4 – PROPOSITIONS –

 

Au vu de ce qui précède, je suis dubitatif sur les possibilités d’améliorer la répression et donc la prévention des discriminations à partir d’un simple amendement de la rédaction des textes existants. Le comportement des magistrats prend en effet, ici, ses racines dans les fondements du droit pénal et de la criminologie.

 

Il me semble tout d’abord que ces délits, comme délits aux valeurs fondamentales, doivent être maintenus en tant que tels. La liberté syndicale, comme le droit à l’égalité des sexes et des races doivent être affirmés fortement, par une société qui se veut républicaine et moderne, comme des valeurs fondamentales, et ceci passe par la reconnaissance pénale.

 

Mais la protection d’une valeur sociale assurée par un délit aux valeurs fondamentales n’a de sens que si cette valeur est majoritairement respectée et qu’il ne s’agit que de réprimer des errements marginaux. Si ces errements sont la règle comme en matière d’atteintes à la liberté syndicale, alors cette protection n’a pas beaucoup de sens.

 

Il faut donc d’abord œuvrer pour que cette valeur entre dans les faits.

 

L’évolution de la jurisprudence sociale ouvre un espoir. On peut en accroître les effets en facilitant au salarié la preuve de la différence de traitement qui à l’heure actuelle pose encore problème. Mais on ne peut, dans ce domaine comme dans beaucoup de domaines des relations salariales, espérer voir réellement changer les choses à grande échelle par la seule voie de l’action judiciaire privée. Toutes nos observations montrent que le lien de subordination est un frein majeur au droit d’ester en justice du salarié. L’essentiel du contentieux prud’homal se réalise à effet après le licenciement, et il est alors trop tard pour défendre la liberté syndicale ou l’égalité des sexes et des races dans l’entreprise. Les quelques exemples jurisprudentiels récents qui donnent à espérer, ne doivent pas cacher la réalité : ces exemples concernent des grandes entreprises avec des syndicats puissants bénéficiant donc déjà d’un certain rapport de forces. Ils ne sont pas transportables à l’écrasante majorité des autres entreprises.

 

En l’état actuel de notre système juridique la coercition sociale passe par le pénal. Les incitations financières, outre un aspect inique qu’il est difficile de gommer, ont fait la preuve de leur inefficacité, au moins en termes d’échelle. Dans d’autres systèmes juridiques, il serait possible d’envisager des amendes ou des injonctions impératives de l’administration, mais cela ne semble guère dans l’air du temps en France. La seule solution plausible dans notre système pour créer une arme pénale, efficace à grande échelle, serait l’institution d’un véritable délit de discipline sociale qui a consacré l’existence d’un principe de l’égalité de traitement des salaires. Ces temps sont donc révolus où, selon les paroles de l’Evangile les premiers pouvaient être les derniers et les derniers, les premiers, au bon vouloir de l’employeur. La liberté d’entreprendre ne peut justifier un pouvoir de droit divin. Le traitement particulier d’un salarié doit pouvoir se justifier par des critères objectifs licites, propres au bon fonctionnement de l’entreprise (qui sont d’ailleurs connus : la responsabilité, la compétence, l’ancienneté, les contraintes, le rendement). Les fondements politiques pour l’institutionnalisation d’une telle obligation pénalement sanctionnée, existent bel et bien, puisque le principe d’égalité est un des principes fondateurs de la République. Ainsi donc l’employeur serait tenu à l’égalité de traitement entre salariés, sauf justifications licites bien entendu, sous peine de sanctions pénales. Il ne pourrait plus donc occulter une véritable pratique discriminatoire en invoquant un droit au silence sur sa motivation. La répression pénale pourrait enfin jouer son rôle puisque l’intention délictueuse, qui fait aujourd’hui problème, deviendrait implicite à la pratique d’une différence de traitement non justifiée.

 

Dés lors, il serait opportun de proposer que soit crée, à côté des délits de discrimination existants, dont les sanctions pourraient être renforcées et harmonisées, un nouveau délit sanctionnant l’inégalité de traitement lorsque celle-ci n’est pas justifiée par un motif licite. Cette création pourrait prendre la forme d’un article spécifique du code du travail, mais je pense qu’il serait plus conséquent et plus judicieux d’aménager et de transformer la protection des droits des personnes et des libertés, contenue dans l’article L 120-2 du Code du Travail.

 

            -La rédaction de l’article L 120-2 pourrait ainsi devenir la suivante :

 

“ Nul ne peut apporter aux droits des personnes, aux libertés individuelles et collectives , ainsi qu’à l’égalité de traitement des salariés, de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché ”

 

La prescription me semble suffisamment exhaustive pour viser toutes les situations de discrimination possibles dans le respect de la liberté d’entreprendre.

 

            -Les pénalités de l’obligation pourraient être contenues dans un article L 152-1 (les articles actuels L 152-1 et suivants, devenant L 153-1 et suivants) :

 

“ Quiconque aura porté ou tenté de porter atteinte aux droits des personnes, libertés individuelles et collectives ou à l’égalité de traitement des salariés par méconnaissance des dispositions de l’article L 120-2 sera puni d’une peine d’emprisonnement de 3 mois et d’une amende de 25 000 F ou de l’une de ces deux peines seulement ”.

 

Il me semble nécessaire d’étendre le délit à l’ensemble de l’obligation qui serait nouvellement définie par l’article L 120-2, pour deux raisons. La première est qu’il serait paradoxal de ne pénaliser qu’une partie des droits fondamentaux puisque l’on introduirait ainsi une hiérarchie de valeur qui n’a pas de sens. La deuxième est que les droits fondamentaux s’entretiennent mutuellement. Ainsi par exemple nous avons indiqué que les recours judiciaires des salariés en matière de discrimination n’étaient pas fréquents, en raison de la crainte de mesures de rétorsion ; on peut donc espérer que la protection pénale du droit d’ester en justice permettra aux salariés, victimes de discrimination de mieux se défendre.

 

Il me semble indispensable de punir la tentative, car c’est par la menace que la plupart du temps l’employeur qui pratique la discrimination parvient à ses fins.

 

Les sanctions indiquées sont les sanctions pénales minimales des délits. Conformément au nouveau code pénal, emprisonnement et amende sont en relation selon le barème 1 an de prison / 100 000 F d’amende. Elles peuvent naturellement être renforcées, mais leur niveau doit être en toute logique inférieur à celui des délits de discrimination.

 

            - Enfin, pour assurer plus de transparence dans un domaine qui le mérite, il serait particulièrement utile et même indispensable, d’imposer un droit à la connaissance des motifs qui justifient la différence de traitement, à l’instar du droit à la connaissance des motifs d’une sanction. Celui-ci pourrait faire l’objet d’un nouvel alinéa à l’article L 120-2 précisant :

 

“ L’employeur est tenu, à la demande écrite du salarié, dénoncer les motifs qui justifient ces restrictions ”.

 

 

En souhaitant que ces quelques réflexions puissent aider au travail du GED, je vous prie chère Madame, de recevoir mes cordiales salutations.


Annexe 2 Quelques arrêts et jugements en matière de discrimination raciale

 

 

 

 

Une circulaire du 16 juillet 1998 de la Garde des Sceaux demandait aux procureurs généraux et aux procureurs de la République “ de faire preuve de vigilance renforcée dans la recherche et la constatation de ce type d’infraction ”.

 

En France, selon le ministère de la justice (réponse à une question écrite d’un sénateur), il y a environ 80 condamnations (74 en 1995, 81 en 1996) par an par les tribunaux. Or, ce chiffre englobe aussi les condamnations pour injures racistes, incitation à la haine raciale, apologie des crimes contre l’humanité (révisionnisme) …. Il y a donc très peu de condamnations en matière de délit pénal de discrimination. Par ailleurs, aucune statistique n’existe sur le nombre de plaintes déposées et d’affaires jugées en la matière, seules les condamnations étant comptabilisées par le casier judiciaire[81].

 

De surcroît, les décisions en matière de délit pénal de discrimination raciale sont peu diffusées et difficilement accessibles. Aucun service de l’administration ne les collecte effectivement, les associations n’ont à leur disposition que les jugements relatifs aux affaires qu’elles ont menées, et les greffes des tribunaux français sont très réticents à collaborer afin de transmettre copie des jugements sur demande. De plus, le repérage des décisions dépend exclusivement de la diffusion d’informations sur les dossiers dans la presse. Les affaires non couvertes par la presse sont de fait inaccessibles. Ainsi, la seule conclusion que l’on puisse tirer du nombre accru de décision de l’année 2000 dans cette liste, est le fait que ces délits de discrimination raciale aient intéressé la presse, ce qui a permis d’en identifier les coordonnées.

 

La revue des décisions révèle que la poursuite pénale de personnes morales d’une part, et la demande de mise en cause d’une personne morale quant à sa responsabilité civile afin qu’elle soit trouvée responsable des dommages-intérêts prononcés d’autre part, sont des  possibilités très peu utilisées, tout comme la réquisition par le parquet de peines accessoires contre un établissement, tel une boîte de nuit ou un employeur. Les peines de prison ne sont pas systématiquement requises et sont généralement courtes et prononcées avec sursis. Les peines d’amendes sont stabilisées depuis quelques années autour de 10 000 F ou moins. Seuls les dommages-intérêts fluctuent en fonction des circonstances. Le recours aux peines complémentaires de déchéance des droits civiques ou de fermeture d’établissements par exemple, est inexistant. Seules quelques affaires récentes requièrent publication du jugement de condamnation dans la presse locale.

 

Par ailleurs, toutes les affaires ayant donné lieu à condamnation comportaient soit des éléments de preuve écrite de la discrimination ou l’apport d’un témoin, qu’il soit conseiller de l’ANPE, agent immobilier, tiers qui accepte de souscrire une attestation, huissier ou policier. La victime qui ne détient pas d’écrit ou qui ne bénéficie pas de l’appui de témoin(s), est sans recours.

 

-         TGI de Vannes, 29 juin 2000, Madame L. : Offre d’emploi et complicité d’offre d’emploi discriminatoire en publiant une fiche de poste posant une condition d’origine. Porté en appel.

Condamnation :

3000 F d’amende avec sursis pour la complice et un mois de prison avec sursis assorti d’une amende de 10 000 F pour l’auteur principal ; 3000 F de dommages intérêts en faveur de la CFDT et à 5000 F de dommages-intérêts en faveur du MRAP en plus des frais de recours.

 

-         TGI Chateauroux, 14 juin 2000, Madame G. : refus d’embauche discriminatoire.

Condamnation:

2500 F d’amende, 2500 F de dommages-intérêts et aucun frais à la victime, 1 F de dommages-intérêts et aucun frais pour le MRAP.

 

-          TGI Grenoble, 20 mars 2000, Mr L. : Discrimination à l’embauche suite à une déclaration raciste à un Agent de ANPE, suite à un testing. Porté en appel.

Condamnation :

2 mois de prison avec sursis, amende de 10 000 F et publication du jugement dans le journal Le Dauphiné et Libération; 7000 F de dommages-intérêts en faveur de la victime, 5000 F de dommages-intérêts en faveur de SOS Racisme. Les auteurs du testing de SOS Racisme ont été entendus comme témoins.

 

-          TGI Toulouse, 14 mars 2000, Talieu Christelle : discrimination raciale à l’embauche par un agent d’accueil à la chambre de commerce et d’industrie.

Condamnation : L’employée est reconnue coupable de discrimination raciale à l’embauche et condamnée à une amende de 10 000 F.

 

-         TGI Compiègne, 1er février 2000, Ouazzani, Lejeune : discrimination raciale dans le logement – résiliation de bail abusive, condamnation par constitution de parties civiles après un classement sans suite, .

Condamnation :

3 mois de prison avec sursis, 20 000 F d’amende, 40 000 F de dommages-intérêts à chacune des victimes pour le préjudice moral et 5000 F pour préjudice matériel. En outre, elle est condamnée à 20 000 F de dommages-intérêts chacune pour les parties civiles, soit le MRAP, SOS Racisme, la LDH, en plus de 2000 F pour chacune au titre l’indemnité de frais, et à la publication dans la presse locale. Relaxe du conjoint et de la propriétaire de l’immeuble.

 

-         TGI Mans, 14 janvier 2000, Sangaré et autres , Bar “ Le Portland ” : discrimination dans le fourniture de biens et de services suite à un testing.

Condamnation :

Le gérant est condamné à 10 000  F d’amende et le portier à 5000 F d’amende, peines requises par les parties civiles. Des dommages-intérêts de 3 500 F sont ordonnés au bénéfice de chacune des victimes et 2000F à chacune des parties civiles, soit le PRAP, SOS Racisme et la LDH. Finalement, il est ordonné de publier le jugement dans Ouest France et Le Maine Libre. Le patron a fait appel et le jugement est attendu pour le 31 octobre 2000.


 

-         TGI Paris, 13 janvier 2000, BPS Interim- Ouakrat :  discrimination raciale à l’embauche

Condamnation :

Responsable d’agence condamnée à une peine d’avertissement donc à 6000 F d’amende avec sursis, 1 F de dommages-intérêts au MRAP et à la LICRA et 3, 906 F au total au titre des indemnités de recours.

 

-         TGI Saint-Nazaire, 11 mai 1999, Thobie : Refus déclaré d’embauche d’un étranger à un agent de l’ANPE qui accepte de donner une attestation.

Condamnation :

2 mois de prison avec sursis contre le déclarant, et 10 000 F d’amende, 5000 F de dommages-intérêts à la victime et 1500 F d’indemnité pour frais, et un franc de dommages-intérêts au MRAP avec 1500 F d’indemnité pour frais.

 

-         TGI Tours, 29 avril 1999, SOS Racisme, discothèque “ Le Pym’s ” : discrimination dans la fourniture de biens et services suite à un testing.

Condamnation :

12 000  F d’amende pour le gérant, 6000 F pour le directeur et 3000 F pour le portier ; 1000 F de dommages-intérêts pour chacun des plaignants et pour la partie civile. Ce jugement a été confirmé par la Cour d’appel le 3 novembre 1999.

 

-         TGI Cambrai, 23 février 1999, Chakib, M. Vantine : discrimination raciale à l’embauche.

Condamnation :

Au delà des réquisitions du Ministère public : 3 mois de prison avec sursis, 30 000 F d’amende et  4000  F de dommages intérêts pour la victime, un franc de dommages-intérêts au MRAP et à la LDH, et 4000 F chacun au titre des frais.

 

-         TGI Paris, 19 novembre 1998, MRAP, madame B. et Lelandais : licenciement discriminatoire d’une salariée dans une chaîne de parfumerie.

Condamnation :

Déclare le directeur commercial coupable du délit de discrimination et le dispense de peine, le condamnant  à des dommages-intérêts de 10 000 F pour la victime, de 1 franc pour le MRAP et de 600 F de frais. La chaîne de parfumerie n’est pas poursuivie pénalement ou civilement.

 

-         C.A. Paris, 20 mars 1997, Gheridi, Konish et Société Nidek Europarc : licenciement discriminatoire s’appuyant sur une note de service motivant la décision par l’origine du salarié.

Condamnation :

Le Tribunal de Grande Instance de Créteil constate le licenciement discriminatoire le 28 février 1996, ne retient pas la responsabilité pénale de la société mais la condamne à verser 100 000 F de dommages-intérêts à la victime et 5000 F au MRAP, à SOS Racisme et à la LICRA..

Appel est interjeté. La Cour d’Appel de Paris, le 20 mars 1997, confirmant le caractère discriminatoire mais réduisant les dommages-intérêts à 20 000 F pour la victime et 3000 F pour le MRAP, pour SOS Racisme et la LICRA.

 

13. C.A. Grenoble, 7 octobre 1994, MRAP, Bertrand, Mouton : Citoyen chargé d’un ministère de service public ayant refusé le bénéfice d’un droit  en raison de l’origine.

Refus d’attribution de logement  motivé par la nationalité. Relaxe parce que décision prise au niveau d’une commission collégiale.

 

14.  TGI Evreux, 25 novembre 1993, Bidault : discrimination raciale à l’embauche.

Condamnation :

Déjà trois fois condamné, il est condamné à 6 mois ferme, 10 000 F de dommages-intérêts et 5000 F d’indemnité pour frais. La condamnation est supérieure à ce qui avait été requis par la partie civile.

 

16. Rochefort –sur-mer, 3 mars 1992, Pieux, Tierce, Giraud, Sennavoine et la Commune de La Tremblade, en qualité de civilement responsable : Constitution d’un fichier d’informations nominatives illicites par la police municipale de La Tremblade, infraction aux articles 15-30 et 45 de la loi 78-17 du 6 janvier 1978.

Condamnation :

Le ministère public a requis la dispense de peine. Chaque prévenu déclaré coupable est condamné à une amende de 3000 F. Les dommages à la partie civile sont fixés à 1 franc et l’indemnité de recours à 800 F.

 

 

Plainte classée sans suite :

 

Hotel Formule 1 : refus de fourniture de biens et services

 

Les plaignants avaient réservé une chambre à l’Hôtel formule 1 de Besançon. A leur arrivée, une discussion s’est engagée avec les gérants de l’hôtel qui proférèrent des injures racistes, leur remettent leur chèque et annulent la réservation. Après insistance, le commissariat enregistre une main courante alors qu’ils souhaitent porter plainte. Ils arrivent à porter plainte au  commissariat de leur domicile. La plainte est classée sans suite malgré la preuve de la réservation et du chèque.

 

Décisions du Tribunal administratif

 

Tribunal administratif de Marseille, 7 avril 1998, Commune de Vitrolles : Prime de naissance discriminatoire

 

Déféré à la censure du Tribunal administratif de Marseille, la création par le conseil municipal de Vitrolles, en date du 20 février 1998, d’une allocation municipale de naissance dont le versement est subordonné à la condition de nationalité française ou de ressortissant d’un pays membre de l’Union européenne. Le Tribunal a fait droit à la demande le 7 avril 1998, et appel a été interjeté. Une procédure est en cours devant le Tribunal correctionnel fondée sur un délit de provocation à la discrimination et un délit de discrimination, en délibéré, le jugement sera prononcé le 8 novembre 2000.


Affaires en cours

 

Villefranche-sur –Saône, août 1999 : discrimination à l’embauche.

 

Le MRAP a déposé plainte en août 1999, auprès du procureur de la République de Villefranche-sur-Saône, pour discrimination à l’embauche après la découverte dans le Beaujolais d’affiches proposant des “ vendangeurs européens ” aux viticulteurs. Cette affiche émanait de l’Association Appellation contrôlée. L’inspection du travail a été saisie.

 

CNIL, 22 décembre 1998, MRAP- Crédit Agricole : refus de service discriminatoire

 

Un article de presse paru dans “ Que choisir ” et dans “ Le Monde ” dénonçait le fait que le Crédit Agricole refuse systématiquement l’attribution de “ crédit open ” à des personnes appartenant à des nationalités “ statistiquement risquées ”. Le MRAP a interpellé le Directeur-général-adjoint du Crédit Agricole et la CNIL. Le MRAP a porté plainte avec constitution de partie civile et le 22 décembre 1998, la CNIL a rendu une recommandation condamnant le critère de la nationalité dans la technique du “ score ”. L’instruction reste en cours.

 

 

Versailles, Juillet 1998, IKEA : discrimination à l’embauche

 

En juillet 1998, une note d’une responsable de la distribution des catalogues IKEA à l’attention des responsables des services clientèle indiquait que, pour le suivi du contrôle de la distribution des catalogues sur le terrain, il convenait pour mener les enquêtes de “ ne pas recruter de personnes de couleur, car c’est malheureux à dire, mais on leur ouvre moins facilement la porte et il s’agit d’avancer vite”. Le MRAP a porté plainte avec constitution de partie civile. La poursuite pénale a été intentée contre l’auteur de la note, l’audience de plaidoirie aura lieu le 5 février 2001.

 

 

 

 

 


BIBLIOGRAPHIE

 

I-Conventions et textes internationaux

 

(*Les dates d’entrée en vigueur qui figurent ci-après indiquent la date d’entrée en vigueur en France)

 

Organisation des Nations Unies

 

Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

( 21 décembre 1965, entrée en vigueur1971)

Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes

( 1979, entrée en vigueur 1984)

Convention C158 concernant la cessation de la relation de travail à l’initiative de l’employeur (entrée en vigueur en 1990).

 

Organisation internationale du travail

 

Convention C111 concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession

(1958, entrée en vigueur 1982)

 

Conseil de l’Europe

 

Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, article 14.

(1950, entrée en vigueur 1953)

Charte sociale européenne revisée, Partie II article 20, et Partie IV article E

 ( 3 mai 1996, ratifiée par la France le 7 mai 1999)

 

Communautés européennes

 

Protocole du 7 février 1992 sur la politique sociale

Articles 2, 6 alinéa 3, 7.

Traité instituant la communauté européenne

Article 2, article 141 (ancien article 119 du Traité de Rome amendé par le Traité d’Amsterdam), article 13, articles 220 à 245.

(entrée en vigueur 1er mai 1999)

Directives :   -     75/117, Relative à l’application du principe d’égalité de rémunération.

-    76/207, Relative à la mise en oeuvre du principe de l’égalité de traitement.

-          97/80, Relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination à raison du sexe

-          2000/43, Relative à la mise en ouvre de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race et d’origine ethnique.

 

II- Textes administratifs français

 

Ministère du travail, circulaire no. 96-12 du 30 décembre 1996.

Le Garde des Sceaux, Ministre de la justice, du 18 juillet 1998 : Circulaire aux procureurs généraux et Procureurs de la République, Lutte contre le racisme et la xénophobie.

Le Garde des Sceaux, Ministre de la justice, du  31 mai 2000: Circulaire aux procureurs généraux, Procureurs de la République et magistrats du parquet, Première présentation des dispositions de la loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes.

Ministère de l’emploi et de la solidarité :  Circulaire no. 99-14, Orientations et actions prioritaires de l’inspection du travail pour 1999.

 

III-Rapports

 

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CNCDH, 1997, Les discriminations sur les lieux de travail et à l’embauche.

Conseil d’Etat,  Rapport Public 1996, Sur le principe d’égalité,  La documentation Française, 1997.

CNCDH, 1998, La lutte  contre le racisme et la xénophobie, exclusion et Droits de l’Homme, La documentation française, 1999, chapitre 3, Discrimination dans le monde du travail, (contributions du Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, de la CFDT, de la CGT, de Force Ouvrière, LICRA, MRAP, SOS Racisme, Réflexions et recommandations).

Rapport du Haut-Conseil à l’intégration relatif aux discriminations, octobre 1998.

Belorgey, J.-M., Lutter contre les discriminations, Rapport à madame la Ministre de l’Emploi et de la Solidarité, mars 1999.

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Actes du colloque “ Le mot race est-il de trop dans la constitution ”, organisé par l’Université de Paris XII, 27,28 mars 1992, Mots, Les langages du politique, no.33 “ SANS DISTINCTION DE…RACE ”, Décembre 1992.


IV- Doctrine juridique

 

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Testing

 

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VI-Jurisprudence

(ordre chronologique)

 

Cour européenne des droits de l’Homme

 

Airey c. Irlande, arrêt du 9 octobre 1979, A no. 32.

Salabiaku c. France, 7 octobre 1988, A no. 141-A.

Pham Hong c . France, 25 septembre 1992, A. no. 243

Dombo Beheer BV c. Pays-Bas, 27 octobre 1993.

Delcourt, 17 janvier 1990.

Schenk c. Suisse, 12 juillet 1988.

 

Cour de justice des communautés européennes

 

CJCE, 13 juillet 1962, Kockner-Werk, aff. 17 et 20/61, Rec. 1962, 619

CJCE, 17 juillet 1962, République Italienne, aff. 13/63, Rec. 1963, 335

CJCE 8 avril 1976, Defrenne II, aff. 43/75, Rec., 455.

CJCE 15 juin 1978, Defrenne III, aff. 149/77, Rec., 1365

CJCE 27 mars 1980, Jenkins, aff. 129-79 rec. p. 1275.

CJCE 13 mai 1986, Bilka-Kaufhaus GmbH c ; Karin Weber von Hartz, aff. 170/84, Rec. 1607

CJCE 1er juillet 1986, Gisela Rummler c. Datodruck, aff. 237/ 85, Rec. 2101

CJCE 30 juin 1988, République française, Action juridique, mars 1989, 26

CJCE 25 octobre 1988, République française, aff. 312/86, Dr.Soc. 1990

CJCE 13 juillet 1989, , Rinner-Kuhn, aff. 171-88, Rec. 2743

CJCE 17 octobre 1989, Danfoss, aff. C-109-88 Rec. 3199.

CJCE 8 novembre 1990, Dekker, aff. C-177/88, CSBP no. 26, A.2, 5

CJCE 7 Février 1991, Nimz, aff. C-184/89, Rec. I-297

CJCE 27 octobre 1993, Enderby, aff. C-127/92, Rec. p. 5566.

CJCE 31 mai 1995, Dansk Industri, RJS 11/95 no.1191.

CJCE,  23 mai 1996, O’Flynn, aff. C-237/94, Rec. p. 2617.

CJCE 30 avril 1998, CNAVTS c. Mme Thibault, note M.-T. Lanquetin, D.1998, somm.com. p. 246

CJCE, 9 février 1999, Regina c. Seymour, aff. C-167/97.

CJCE, 10 février 2000, Deutsche Telekom c. Schröder, aff. C-50/96, Curia.

 

France

 

Voir jurisprudence citée dans Lanquetin, M.T., Pettiti, C., Sutter, C., L’égalité juridique entre hommes et femmes dans la communauté européenne, France, Bruylant, 1994.

CA Versailles, 15 avril 1985, SA Paridoc c. Mme OTT, in Lanquetin, Ibid, p. 180.

C.A. Riom, 2 mars 1987, SA Dunlop France c. Clavaud, Dr.ouv. 1987, 97, note Gérard lyon-Caen ; conclusions de l’avocat général Henry Ecoutin devant la Cour de cassation, Dr.Soc. 1988, 428.

Cass.soc. 10 déc.1987, société Flornic Schlumberger c. Celik,  Dr.Soc. 1990, 109.

Cass. soc. 16 mars 1989, Mme Pullès c. Centre de Radiologie de Romans, Cahiers sociaux du Barreau de Paris, 1989, no. 9 , A.26, p. 109.

C.E. 20 octobre 1989, Nicolo, RJF 11/89, no.1266.

Cass.soc. 7 mai 1991, Société Cogem c. Ocal, Bull.V 1991, no. 234.

Cass.crim, 17 mars 1992.

Cass.soc. 8 avril 1992, Boufagher c. Groupement Penly, Bull. V. 1992, no. 256.

Cass.crim 12 mai 1992, UD-CFDT Hautes Alpes.

Cass.crim. 1 er déc. 1992, CFDT c. Renger et Hersant, Bull. crim. 1992, no. 398.

CA Paris 15 février 1994, Pradel c. SA Magnol, RJS 5-94 no. 646.

Cass.crim. 8 mars 1994, CFDT-Métaux c. Compagnie IBM France, Dr.Soc. 1994, p. 890.

C.A. Paris 29 mars 1994, C.Cros c. SA Lucie Saint-Clair RJS 8-9-94 no. 1103.

Cass.soc. 30 mars 1994, CNAVTS c. Duchemin, Dr.Soc. 1994, 561.

Cass. Crim. 25 mai 1994, Bull. 1994 Louvet Marcel, Thouvenin, Denis. no. 203.

C.A. Riom, Ch.soc., 16 janvier 1995, SARL USAI Champignons c. Mme Fabienne Douarre, Dr.Soc. 1995, p. 441.

Cass.soc.9 avril 1996, Mme Stoufflet c. CPAM de la Marne, Dr.ouv. 1998, p. 10.

Cass. soc., 29 octobre 1996, Société Delzongle c. Ponsolle voir Lyon-Caen, A., De l’égalité de traitement en matière salariale, Dr.Soc. 1996, 1013 ; Dr.ouv.. 1997, p.149, note Pascal Moussy ; note M.T. Lanquetin, D.1998, somm.com. p. 259.

C.A. Paris, 7 novembre 1996, Chollet c. Société Astro et al., Dr.ouv. 1997, p. 176.

Cass. soc. 12 février 1997, Mme Douarre c ; SARL USAI Champignons, Dr.Soc. 1997, 526, note Marie-Thérèse Lanquetin.

CA Paris, 21 février 1997, Société automobile Peugeot Dr.ouv. 1997, 224 note J.-M. Verdier; Conseil des Prud’hommes de Paris, 4 juin 1996, Hennequin et autres, Dr.ouv. 1996, 381, note J.-M. Verdier.

C.E., Section 23 avril 1997, GISTI, RFD Adm. 1997 (13), 595.

Cass.soc. 12 février 1997, SARL Usai Champignon c ; Mme Douarre et al. note M.-T. Lanquetin, Dr. Soc.1997, 526 ;  D. 1998, Somm. com. p. 259.

Cass.soc. 10 février 1998, Mamri c. Sté Simaf, Bull.1998,  no. 78.

Cass.soc. 16 juillet 1998, CNAVTS c. Mme Thibault, C, Cass., Bull. 1998, no. 7, no. 392, p. 297.

CE 23 octobre 1998, Union de fédérations CFDT des fonctions publiques et affiliés.

Cass.soc. 15 déc. 1998, Société Aubin c. Chatet, Dr.Soc. 1999, p. 187, note Michèle Bonnechère.

Cass.soc. 17 mars 1999, Juhel c. Challancin, Action juridique no. 136, 18.

CA Riom, 19 janvier 1999, Debrion c. Manufacture française des pneumatiques Michelin, Action Juridique no. 137, juillet 1999, p. 18.

Cass.soc. 30 mars 1999, Association Alefpa c. Mme Berthellin, Dr.Soc. 1999, 598.

Cass.crim., 11 mai 1999, Bernard et al. (Ville de Montfermeil), arrêt no. 1889.

Cass.soc., 23 novembre 1999, Seillier c. CEA, Voir Lanquetin, Un tournant en matière de preuve des discriminations, Op. Cit..

Conseil de Prud’hommes de Paris, 18 janvier 2000, Brosselin, Patrick et SNJ c. AFP Paris, RG N° F 99/01731.

Conseil de Prud’hommes de Paris, 24 février 2000, Lévêque et Syndicat CFTC c. SA Sonacotra, RG N° 97/00998.

TGI Grenoble, 20 mars 2000, Boumaza Farid, Lafay, no. 1112MP342.

Cass. soc., 28 mars 2000, Fluchère, Dick et Syndicat CFDT c. SNCF, arrêt no 1027 P+B, Voir Lanquetin, Un tournant en matière de preuve des discriminations, op. cit.

Cass.crim. 14 juin 2000, CFDT Interco., arrêt no. 2792.

Cass.soc. 4 juillet 2000, SA Verdome c. Gisbert, Dr.Soc. 2000, 919.

 

VII- Sites Internet

 

Europe :

1.       Cour de justice des communautés européennes : www.curia.eu.int

2.       Conseil de l’Europe :  www.coe.fr

3.       Union européenne : europa.eu.int/welcome.html

 

International :

4.       Nations-Unies : www.un.org

5.       OIT : www.ilo.org

6.       British library of political sciences : www.blpes.les.ac.uk

7.       Hieros Gamos (acces gouvernemental et juridique international pour tous les pays et organisations) : www.hg.org

 

France :

8.       Assemblée nationale : www.assemblee-nat.fr

9.       Bibliographie à propos du débat nord américain et européen sur le multiculturalisme : www.sciences-po.fr/docum/biblio/bib60jcm.html

 

Grande Bretagne :

10.   House of Lords : www.parliament.the-stationery-office.co.uk/pa/ld/ldhome.htm

 

Amérique :

11.   Cour Suprême des Etats-Unis : supreme.findlaw.com/supreme_court/resources.html

12.   Cour suprême du Canada – version française :  www.scc-csc.gc.ca

13.   Commission des droit de la personne du Québec : www.cdpdj.qc.ca

14.    Le centre d’études ethniques de l’Université de Montréal : www.ceetum.umontreal.ca/index.html

 

Associations :

15.   Ligue des droits de l’Homme : www.ldh-France.ass.fr

16.   GISTI : bok.net/pajol/gisti/index.html

17.   LICRA : www.licra.com

18.   SOS Racisme :www.sos-racisme.fr

19.   MRAP : www.mrap.asso.fr/mrap.htm

20.  Human Rights Web : www.hrweb.org

21.   Discrimination Law Association (UK) :  www.parish.oaktree.co.uk/dla/dla1.htm



[1] Expression empruntée à Evelyne Serverin.

[2] Projet de loi de modernisation sociale no. 2415 de la onzième législature.

[3] Articles 1 à 4 de la proposition relative à la lutte contre les discriminations, no. 2566 de la onzième législature.

[4] Cf. Article L122-45 du Code du travail incluant les amendements proposés en soulignés, disposerait :

 “Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, notamment en matière de rémunération, de formation, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation, en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de sa situation de famille, de son appartenance à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses ou, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du Titre IV du livre II du présent code, en raison de son état de santé ou de son handicap.

En cas de litige relatif à l’application de l’alinéa précédent, le salarié concerné ou le candidat à un recrutement présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. (…)

[5] Lanquetin, Marie-Thérèse, Un tournant en matière de preuve des discriminations, Dr. Soc. 2000, 589.

[6] “ Sans préjudice des autres dispositions du présent traité et dans les limites des compétences que celui-ci confère à la Communauté, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, peut prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexes, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle ”.

[7] Le champ d’application de la directive est défini à son article 3. Il exclut les différences de traitement fondées sur la nationalité mais inclut au-delà de l’emploi, la protection sociale, les avantages sociaux, l’éducation et l’accès aux biens et aux services y compris en matière de logement.

[8] La jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes est abondante dans son interprétation de l’article 119 du Traité de Rome et de la directive cadre 76/207 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement : CJCE 8 avril 1976, Defrenne II, aff. 43/75, Rec., 455 ; CJCE 15 juin 1978, Defrenne III, aff. 149/77, Rec., 1365 ; CJCE 27 mars 1980, Jenkins, aff. 129-79 rec. p. 1275 ; CJCE 13 mai 1986, Bilka-Kaufhaus GmbH c ; Karin Weber von Hartz, aff. 170/84, Rec. 1607 ; CJCE 1er juillet 1986, Gisela Rummler c. Datodruck, aff. 237/ 85, Rec. 2101 ; CJCE 30 juin 1988, République française, Action juridique, mars 1989, 26 ; CJCE 25 octobre 1988, République française, aff. 312/86, Dr.soc. 1990 ; CJCE 13 juillet 1989, Rinner-Kuhn, aff. 171-88, Rec. 2743 ; CJCE 17 octobre 1989, Danfoss, aff. C-109-88 Rec. 3199 ; CJCE 8 novembre 1990, Dekker, aff. C-177/88, CSBP no. 26, A.2, 5; CJCE 7 Février 1991, Nimz, aff. C-184/89, Rec. I-297; CJCE 27 octobre 1993, Enderby, aff. C-127/92, Rec. p. 5566 ; CJCE 31 mai 1995, Dansk Industri, RJS 11/95 no.1191; CJCE 30 avril 1998, CNAVTS c. Mme Thibault, note M.-T. Lanquetin, D.1998, somm.com. p. 246 ; CJCE, 9 février 1999, Regina c. Seymour, aff. C-167/97; CJCE, 10 février 2000, Deutsche Telekom c. Schröder, aff. C-50/96, Curia.

[9] Cf. Directive 76/ 207 du 9 février 1976 relative à la mise en œuvre de l’égalité de traitmeent entre homme et femme en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation professionnelle et à la promotion professionnelle et les conditions de travail.

[10] Article 16 de la directive.

[11] Cf. note 7.

[12] Lochak, D., Réflexions sur la notion de discrimination, Dr. Soc., 1987, 778.

[13] Loi d’approbation no. 81-357, 15 avril 1981, J.O. du 17 avril 1981, décret de publication no. 82-726 du  17 août 1982, J.O. 22 août 1982.

[14] Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciales de 1965, loi d’approbation no. 71-392 du 28 mai 1971, décret de publication no. 71-901 du 2 novembre 1971, J.O. 10 novembre 1971; Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979, loi d’approbation no. 83-561 du 1er juillet 1983, J.O. 2 juillet 1983, décret de publication no. 83-193 du 12 mars 1984, J.O. 20 mars 1984.

[15] Conseil d’Etat, Rapport public 1996, Sur le principe d’égalité, La documentation Française, 1998.

[16] Ibid.

[17] Ibid.

[18] Cf. note 8, arrêt Bilka.

[19] C.E. 23 octobre 1998 Union des Fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilés.

[20]  CJCE 27 mars 1980 Aff-129/79 Macarthys Ltd contre Wendy Smith, Rec. 1275 : “ Le principe d’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins pour un même travail n’est pas limité à des situations dans lesquelles hommes et femmes effectuent simultanément un travail égal pour un même employeur. Le principe d’égalité s’applique dans le cas où il est établi qu’un travailleur féminin, eu égard à la nature de ses prestations, a perçu une rémunération moindre que celle que percevait un travailleur masculin, employé antérieurement à la période d’engagement  de l’agent féminin et qui effectuait le même travail pour son employeur ”.

Cf. également Cour d’Appel de Versailles, 15 avril 1985, SA Paridoc/Mme Ott.  Juri-social 1985 (F 60) ; L’égalité juridique entre hommes et femmes dans la communauté européenne, Ed. Bruylant, 1994, et Office des publications officielles des communautés européennes, volume France, p.180.

[21] Article 1 alinéa 2 de la directive 75/117 du Conseil du 10 février 1975 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à l’application du principe d’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins. Egalement article L.140-3 du Code du travail.  

[22] Cf. La jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation : Soc. 29 octobre 1996, Ponsolle, A. Lyon-Caen, De l’égalité de traitement en matière salariale, Dr. Soc. 1996, 1013 ; Dr. Ouv. 1997, p. 149, note P. Moussy, ; D. 1998, Somm. Com. , P ; 259 M.-T. Lanquetin, et Soc. 15 décembre 1998, Chatet, Dr. Soc. 1999, p. 187, note M. Bonnechère.

[23] Cf. note 8.

[24] Cf. point 15 de l’exposé des motifs de la directive 2000/43 : “ L’appréciation des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte appartient à l’instance judiciaire nationale ou à une autre instance compétente, conformément au droit national ou aux pratiques nationales qui peuvent prévoir, en particulier, que la discrimination indirecte peut être établie par tous moyens, y compris sur la base de données statistiques ”.

[25] Cf. note 8, Regina c. Seymour, points 60 et 61.

[26] Cf.  note 8, Enderby, spécialement points 14 et 22.

[27] Bataille, Philippe, Le racisme au travail, , sp. p.105 et suivantes, p.117, ed. La Découverte, 1997.

[28] Miné, M., Approche juridique de la discrimination raciale au travail : une comparaison France-Royaume-Uni, Travail et Emploi n°81, spec. p.99.

[29] Cf. note 8.

[30] Article 1315 C.civ.

[31] Lanquetin, Marie-Thérèse, Op.Cit., note 5.

[32] Cf . note 3.

[33] Serverin, Evelyne,  L’application des sanctions pénales en droit social : un traitement juridictionnel marginal,1994 Dr. Soc. 654, 658,660.

[34] Principalement l’arrêt Boufagher du 8 avril 1992 Bull.V n° 256 p.157.

[35] Cf. Note 3.

[36] CA Paris, 21 février 1997, Société automobile Peugeot Dr.ouv. 1997, 224 note J.-M. Verdier; Conseil des Prud’hommes de Paris, 4 juin 1996, Hennequin et autres, Dr.ouv. 1996, 381, note J.-M. Verdier. Cette affaire souligne les liens étroits entre l’action judiciaire et l’action syndicale. Les négociations entre les organisations syndicales et l’entreprise concernant les discriminations subies par les militants étaient fermées. Le syndicat a suivi une stratégie judiciaire tant pénale que civile pour tenter de mettre fin à cette situation. C’est ainsi qu’après avoir recueilli des éléments relatifs à la carrière des militants par les institutions représentatives du personnel, le recours pénal, soutenu par une enquête de l’inspection du travail et un référé expertise, a permis de constituer la preuve et de faire reconnaître la discrimination par voie de référé prud’homal. L’entreprise Peugeot a alors accepté de négocier avant que la Cour de cassation ne se prononce sur son pourvoi.

 

[37] Cass.crim. 14 juin 2000, CFDT Interco., arrêt no. 2792 et Cass.soc. du 23 novembre et 20 mars 2000, Op. Cit..

[38] Cf. Infra, p.38.

[39] La simple déclaration d’intention d’un responsable du recrutement ne constitue pas un refus d’embauche. Cette déclaration pourrait dans certaines circonstances être constitutive du délit de provocation à la discrimination.  Cass.crim. 12 mai 1992 UD-CFDT Hautes Alpes.

[40] Stefani, G., Levasseur, G., Bouloc, B., Procédure pénale, Précis Dalloz, 2000.

[41] La Loi présomption d’innocence no 2000-516 du 15 juin 2000 réagissait à cette réalité en édictant à son article 114 un amendement au Code de procédure civile qui y ajoute un article 15-3 qui établit l’obligation de la police judiciaire de recevoir les plaintes déposées par les victimes, de les transmettre au service ou à l’unité territorialement compétente. A Paris, lorsque les mains courantes en matière d'infractions racistes ont été bannies, une augmentation substantielle du nombre de plaintes a été observée.

[42] Voir annexe 1,  note soumise au groupe de travail par l’Association Villermé.

[43] Avis du Conseil Economique et social, L’inspection du travail, Liaisons sociales, 24/96, 1.

[44] Cass.crim. 17 mars 1992.

[45] Cf. Rapport du Haut Conseil à l’intégration relatif aux discriminations, octobre 1998 ; Jean-Michel Belorgey, Conseiller d’Etat, Lutter contre les discriminations, Rapport à Madame la Ministre de m’emploi et de la solidarité, mars 1998.

 

[46] La Confédération Force Ouvrière, qui avait pris position contre la proposition du rapport Belorgey relative à une autorité administrative indépendante, a émis des réserves sur cette partie du rapport. Elle indique qu’il ne s’agit pas d’une opposition de principe à toute instance mais souhaite que la réflexion du groupe de travail soit approfondie, notamment :

-          -              sur l’articulation entre cette nouvelle instance et les institutions, organismes et programmes existants ;

-          -              sur les prérogatives et les pouvoirs qu’il conviendrait, le cas échéant, de conférer à cette nouvelle instance pour aboutir à un traitement efficace des discriminations et donner aux victimes des moyens concrets de défense.

La Confédération CFDT a également fait connaître ses interrogations sur cette partie du rapport :

-          -              en quoi un “ laboratoire ” serait-il plus efficace qu’une autorité ?

-          -              quelle interaction entre ce laboratoire et les syndicats et associations ?

Elle souhaite que le débat se poursuive sur ces questions.

 

[47] Voir le Préambule de la Convention ; Airey c. Irlande, arrêt du 9 octobre 1979, A no. 32, § 24..

[48] CEDH, Dombo Beheer BV v. Pays-Bas, 27 octobre 1993.

[49] CEDH, Delcourt, 17 janvier 1990.

[50] Publiée par décret le 9 février 1990.

[51] Bull. Cass., no. 308, 211 ; Cass. Soc.14 mars 2000, D.soc. 2000, 555.

[52] L’article 5 porte sur les modalités de la protection requise contre la détention arbitraire du prévenu.

    L’article 6 dispose :

“ 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut-être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

2. Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

3. Tout accusé a droit notamment à :

-          a.     être informé dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et d la cause de l’accusation portée contre lui ;

-          b.    disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;

-          c.     se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ;

-          d.    interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;

-          e.     se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprends pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. ”

      L’article 13 dispose :

“ Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. ”

 

[53] Cass. Civ. 14 mai 1985, Bull. no. 153.

[54] Cass. Civ. 3, 15 juin 1976, Bull, no. 262.

[55] Bull. V n°126 “ Il appartient au juge de vérifier, en présence d’une discrimination syndicale invoquée, les conditions  dans lesquelles la carrière des intéressés s’est déroulée ”.

[56] Cass. Soc. 15 novembre 1999.

[57] CEDH, Schenk c. Suisse, 12 juillet 1988.

[58] Cass. Sociale, 20 novembre 1991.

[59] Il est à noter que cette preuve peut être introduite dans certains cas par la partie civile dans le cadre du procès pénal.

[60]Cass. Sociale, 2 décembre 1998.

[61] Margénaud, J.P., Le droit à l’expertise équitable, D. 2000, doctrine, 111.

[62] Actes du colloque “ Le mot race est-il de trop dans la constitution ”, organisé par l’Université de Paris XII, 27,28 mars 1992, publié dans la revue Mots, Les langages du politique, no.33 “ SANS DISTINCTION DE…RACE ”, Décembre 1992, Danièle Lochak, p. 300, Danièle Mayer, p. 332.

[63] Cass.crim. 14 juin 2000, no. 9792, Syndicat CFDT.

[64] Grenoble, 20 mars 2000, Boumaza Farid, Lafay, no. 1112MP342.

[65] Coeuret, A., Fortis, E., Le droit pénal du travail, Litec, 1998, p. 186 ; Cass.crim. 2 décembre 1997, JCP G 1998 II 10023, rapp. Desportes.

[66] La simple déclaration d’intention d’un responsable du recrutement ne constitue pas un refus d’embauche. Cette déclaration pourrait dans certaines circonstances être constitutive du délit de provocation à la discrimination.  Cass.crim. 12 mai 1992 UD-CFDT Hautes Alpes.

[67] Stefani, G., Levasseur, G., Bouloc, B., Procédure pénale, Précis Dalloz, 2000.

[68] Stefani, G., Levasseur, G., Bouloc, B., Op. Cit.

[69] Cass.crim., 16 janvier 1990, Bull. no. 25, Gazette du  Palais 1990, 2, 389 : “ de nature à ne pas porter atteinte à la vie privée de l’employeur ”.

[70] Pettiti, L-E, Decaux, E., Imbert, P-H., La Convention européenne des droits de l’homme, Economica, 2e éd., 1999, p. 239 et ss.

[71] Salabiaku c. France, arrêt du 7 octobre 1988, A no. 141-A ; Pham Hong c. France, 25 septembre 1992, A. no. 243.

[72] Cass. Crim. 6 et 13 janvier 1993.

[73] CA Paris, 21 février 1997, Dr.ouv. 1997, note J.-M., Verdier ; Conseil des Prud’hommes de Paris, 4 juin 1996, Dr.ouv. 1996, 381, note J.-M. Verdier.

[74] Avis du Conseil économique et social, L’inspection du travail, Liaisons sociales 24/96, 1.

[75] Audition de Mr Bernard Grassi de l’Association Villermé.

[76] Bull. crim. no.116 ; JCP G, 1993, II, 2202 ; Coeuret, A., Fortis, E., Op.Cit.

[77] Pettiti, C., Le recours aux organes administratifs et aux juridictions, in Verwilgen, M. (dir.), L’accès à l’égalité entre hommes et femmes dans la Communauté européenne, Actes du Colloque de Louvain, Presses de l’Université de Louvain , 1993, 89 ; Haut Conseil à l’intégration, 1998.

[78] Audition de Mr Bernard Grassi, cf. note 75.

[79] Lanquetin, M-T, Pettiti, C., Sutter, C., L’égalité juridique entre hommes et femmes dans la Communauté européenne, France, Bruylant, 1994.

[80] Cf. supra, p. 19.

[81] Serverin, E. Op.Cit.


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